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Le film « Dahomey » de Mati Diop projeté à l’espace culturel Le Centre: Quand l’art ancestral se conjugue avec l’art contemporain

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Ce vendredi 7 mars 2025, l’espace culturel Le Centre a fait voyager ses usagers sur les traces du retour des 26 trésors royaux. A travers « Dahomey » le film documentaire de Mati Diop, les cinéphiles savent un peu plus sur les coulisses de la restitution par la France des trésors royaux et les débats que cela a suscité dans l’opinion.

Novembre 2021, 26 trésors royaux ont quitté la France pour rejoindre le Bénin, 130 ans après qu’ils aient été pillés lors de l’invasion des troupes coloniales françaises. Comment les Béninois ont vécu ce retour ? Sur près de 7000 œuvres, comment se contenter de 26 ? Le débat a fait rage à l’université d’Abomey-Calavi. Témoin de cette aventure, la franco-sénégalaise Mati Diop est revenue, dans son film « Dahomey », sur d’autres facettes de cette restitution que le citoyen béninois n’a pas forcément suivies. Le film a duré 1h 08mn. Il a été lauréat de l’Ours d’or à la Berlinale 2024.

Après la projection, le public a eu droit à une séance d’échange avec Alain Godonou, chargé de mission du Président Patrice Talon aux patrimoines et aux musées et Didier Donatien Alihonou, responsable de l’hydrométrie, membre de l’équipe de montage des 26 trésors royaux. S’agissant du contexte de cette restitution de 26 trésors royaux, Alain Godonou souligne que tout est parti de la vision du chef de l’Etat de faire de la culture un important pilier du développement économique. Le gouvernement y consacre un vaste chantier dans son Programme d’action. Puis, il y a eu la déclaration du Président français Emmanuel Macron au Burkina-Faso où il a émis le vœu de restituer aux pays africains les trésors royaux pillés pendant la période coloniale. Le Président Patrice Talon a saisi cette perche pour demander la restitution des trésors royaux du Bénin.

Quant au choix du film « Dahomey  » Berthold Hinkati, Directeur de l’espace culturel Le Centre, souligne que le Musée de la Récade de l’espace culturel Le Centre est, depuis 2015, le fruit du retour de ces vestiges.  » Au musée de la Récade, nous avons des œuvres issues du retour de nos vestiges, et Mati Diop a fait l’apologie de la restitution des œuvres d’art. C’est une apologie étatique, et nous, nous sommes dans le privé. On a essayé d’acheter des œuvres qui sont dans les ventes publiques depuis 2015. C’est bien de mettre la lumière sur tout ce qui a été fait dans le cadre de la restitution de ces œuvres, et aussi, en même temps, de montrer aux cinéphiles que nous aussi, nous avions fait ce pas, et qu’ils peuvent découvrir autrement ces mêmes vestiges au Musée de la Récade à l’espace culturel Le Centre » a-t-il laissé entendre.

Après avoir suivi le film, Israël Dannoumè affirme se retrouver à reconstituer un peu l’historique derrière la restitution des œuvres d’art et tout ce que cela pouvait représenter. « C’est vrai qu’au début de l’histoire, ça paraissait comme de l’argent jeté par la fenêtre. Mais après avoir vu ce film, j’ai compris l’esprit qui a animé le Président et le gouvernement pour la restitution de ces œuvres-là. Il fallait comprendre un peu ce qui nous avait été pris et ce que cela représentait dans le passé. Et qu’on puisse ramener ça aussi dans le présent pour que la génération à venir puisse réellement suivre l’histoire de notre pays  » a-t-il laissé entendre. A sa suite, Reine Gbodogli, manager culturel en formation, a un mélange de sentiments après avoir visualisé le film. « Déjà une grande tristesse, après quand même un sentiment de fierté que la restitution des patrimoines béninois fasse objet d’un film documentaire qui puisse circuler afin de faire connaître notre patrimoine aux yeux du monde, d’un plus large public. Il y a particulièrement une phrase qui m’a touchée, c’est-à-dire ce qui a été arraché à nos peuples, c’est l’âme du peuple. Je crois que c’est assez vrai et il nous faut faire un devoir de retour, de reconstitution justement de cette âme-là qui a été quelque peu arrachée  » suggère Reine Gbodogli.

Ils ont dit…

Didier Donatien Alihonou, artiste plasticien

« Depuis que j’étais scolaire, on nous parlait des œuvres qui étaient déportées sur la France. Et subitement, quand l’événement est arrivé, on m’a fait appel. Parce que j’ai travaillé aussi dans les musées depuis des années. On m’a dit, viens travailler avec cette équipe de cinq personnes qui s’est occupée de la mise en œuvre de ces œuvres-là. Je suis le seul artiste plasticien. Tout le reste, c’est des spécialistes, c’est des conservateurs. C’est vraiment immense. Le Président de la République a fait tout possible, les ministres ont fait tout possible pour amener les œuvres. Mais ils ne les ont pas touchées. Mais moi, j’ai eu la chance aujourd’hui, après 130 ans, de garder ces œuvres en main, parce que je fais partie de l’équipe de montage. C’est une fierté « .

Alain Godonou, conservateur du patrimoine, chargé de mission du Président de la République au patrimoine et au musée

 » Ça fait la troisième fois que je participe à cet échange après la projection du film et j’ai trouvé cette séance très intelligente, active, et les gens qui étaient là, la jeunesse béninoise et internationale qui était présente, étaient vraiment intéressés. Il y avait un besoin de savoir profond. On sent une demande, on sent un questionnement, on sent que les gens ont envie de savoir, de comprendre, je dirais plus loin, on sent que les gens ont envie d’adhérer, mais ils attendent de bonnes informations pour adhérer. Les œuvres sont conservées, gardées en réserve, c’est le principe. Nous sommes dans une dynamique muséale, et avant de monter une grande exposition, comme celle qu’on va monter dans nos grands musées, les œuvres sont en réserve, mais surveillées, traitées, regardées, photographiées, documentées, et préparées pour retourner en exposition ».

Dominique Zinkpè, artiste plasticien

 » Je suis ébloui et heureux en même temps. C’était incroyable de voir que réellement un rêve est devenu réalité. Nous avons les œuvres de nos ancêtres qui ont touché le sol du Bénin, d’où ils étaient partis. C’est une grande fierté pour le Bénin. D’autres pays ont eu moins, le Bénin a eu beaucoup. Mon opinion, il n’y a pas d’inspiration qui ne vient pas déjà d’un entourage immédiat, ou qui ne vient pas de sa culture profonde. Et ce que j’admire, les artistes béninois en général ne sont pas naïfs du tout. Les Béninois ont été au rendez-vous dans les meilleurs endroits de ce monde. Et aujourd’hui, l’art ancestral se conjugue avec l’art contemporain, en fierté et en majesté en plus. J’admire cette force de frappe, d’intelligence et de culture qui réussit à transformer l’art traditionnel en art contemporain. Les artistes béninois réussissent à faire le pont avec l’art ancestral pour atteindre le monde à travers l’art contemporain ».

Bertrand HOUANHO

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