Après la restriction qui n’est qu’une interdiction déguisée du droit de grève aux travailleurs, Patrice Talon et son régime montrent désormais leur hostilité même aux simples marches de dénonciation des agents de l’Etat. Un comportement qui démontre, s’il en est encore besoin, l’aversion du régime aux voix discordantes dans une démocratie qui se noie.

Avec Patrice Talon, rien n’est plus comme avant. Alors que les régimes précédents ont souvent été secoués à tort ou à raison par de sérieux et violents mouvements de grève, l’avènement de la Rupture et du nouveau départ a conjugué ces moments d’expression démocratique au passé. Prenant ses marques à la tête du pays, l’actuel Chef de l’Etat, par le truchement du Parlement, a supprimé la jouissance du droit de grève pour certains corps tout en limitant pour d’autres. Ceci, à travers la prise de la loi N°2018-34 du 5 octobre 2018 modifiant et complétant la loi N°2001-09 du 21 juin 2002 portant exercice de droit de grève en République du Bénin. Autrement, celle-ci retire ce droit aux magistrats, aux personnels de la santé, de la sécurité et le limite aux agents du secteur de l’éducation, pour une durée de dix jours de grève par an.

Pis, cette restriction a été élargie en 2022 aux agents des secteurs d’activités portuaires et aéroportuaires ainsi qu’à ceux des hydrocarbures. Jugée liberticide et antidémocratique par l’opposition et la société civile, rien n’y fait. Alors que beaucoup pensaient que le régime allait s’arrêter à ce niveau déjà très dégradant pour la lutte syndicale, c’était sans compter sur la ruse qui devrait accompagner cette loi. Et, ce sont les enseignants du supérieur qui ont goûté au premier délice du corollaire de cette réforme. Même pour de simples sit-in, ils ont été défalqués sévèrement. Une situation qui annonçait les couleurs de jusqu’où Patrice Talon et ses sbires voulaient aller pour tuer dans l’œuf tout mouvement de contestation venant des travailleurs.

La preuve, il a encore fallu plusieurs marches de ces travailleurs contre la cherté de la vie à l’occasion de l’édition 2024 de la fête du travail, pour découvrir que l’interdiction de la grève n’était que la face visible de l’iceberg. Puisqu’en plus d’interdire ces marches, les responsables syndicaux ont été arrêtés et conduits à la brigade criminelle. Tels des forcenés, ils ont été auditionnés toute une journée par des officiers commis à la tâche. Une première dans l’histoire du Renouveau démocratique. L’autre marche de protestation programmée par la Cstb ce 1er mai n’a également pas pu éclore, pour avoir été à son tour soldée par plusieurs arrestations dans le rang des travailleurs. De ces faits, l’on retient clairement que le gouvernement développe un dédain plus que patent à toute voix discordante. Dans un pays qui se veut démocratique, refuser d’admettre le minimum de contradiction revient à brader les principes du vivre-ensemble.

Si le service minimum refuse d’être assuré par l’Etat quant au non des travailleurs, il est évident que le pire pourrait toujours surgir. Aller jusqu’à arrêter les responsables syndicaux pour une marche syndicale parait chélou, avec cette image désobligeante envoyée à l’étranger. Et si le gouvernement de la Rupture persiste dans sa logique, ça n’étonnera personne qu’une loi vienne restreindre la marche ou carrément l’interdire, à l’instar du droit de grève.

M.M

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