Au Bénin, pays autrefois réputé pour son modèle démocratique, il ne fait plus bon vivre pour les voix critiques, depuis l’avènement du régime de la Rupture en 2016. Pire, ce qui est déploré à l’interne étend de plus en plus ses tentacules dans la sous-région. Dorénavant, c’est chez les voisins que le Bénin va s’illustrer dans le rapt de citoyens exilés, fuyant la répression des voix discordantes.

Et de deux sous la Rupture. Après le cas Steve Amoussou au Togo, c’est Hugues Comlan Sossoukpè qui a été cueilli en terre ivoirienne et extradé au Bénin, en violation de son statut de réfugié, obtenu au Togo où il réside depuis environ 7 ans. Dans le temps, le cas Steve Amoussou, le cyberactiviste béninois accusé de tenir un compte critique envers le pouvoir, avait fait réagir les autorités togolaises. Dans un communiqué, le Parquet de Lomé a révélé le nom des ravisseurs béninois de Steve Amoussou sur le territoire togolais contre qui il a ouvert une information judiciaire. Un mandat d’arrêt international a été décerné contre eux pour « enlèvement et complicité d’enlèvement et de séquestration ». Même si Steve Amoussou n’était pas protégé par un statut de réfugié au Togo, il est clair, eu égard au droit international, que la justice béninoise n’était pas en droit d’aller chercher un justiciable sur le territoire d’un pays voisin, sans s’en référer aux autorités judiciaires de ce pays-là. Après les indignations suscitées par le rapt de Steve Amoussou dans le rang des organisations de défense des droits de l’homme, on était loin d’imaginer que le pire arrivait.

Le cas Sossoukpè

Comlan Hugues Sossoukpè n’était pas qu’un simple exilé au Togo. Il y avait obtenu le statut de réfugié. Dans ce cas, une fois interpellé en Côte d’Ivoire, pouvait-il être extradé dans son pays d’origine, pays qu’il a fui parce que ne se sentant plus en sécurité ? Sur la question, le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés stipule : « En vertu du principe du non-refoulement sur lequel est fondé le droit d’asile, il est interdit de refouler une personne vers un territoire où elle a des raisons de craindre d’être persécutée. D’ailleurs, on ne peut pas considérer qu’un réfugié bénéficie d’une protection complète tant qu’il n’est pas également protégé contre l’extradition vers un pays où il a des raisons de craindre d’être persécutée » (https://www.unhhcr.org note-sur-les-problèmes-d’extradition-affectant-les-réfugiés) lit-on dans le journal Fraternité du 16 juillet 2025. Le canard de Mènontin va plus loin en publiant le paragraphe 1 de l’article 33 de la Convention de 1951 relative aux réfugiés : « Aucun des Etats contractants n’expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions publiques ».

Ces deux paragraphes croisés, il est une évidence que, arrêté en Côte d’Ivoire, Hugues Comlan Sossoukpè ne devrait pas être extradé au Bénin. Le faisant, le Bénin peut être accusé, comme l’a fait déjà Reporters sans Frontières, d’avoir violé la Convention de 1951 relative au statut des réfugié, ainsi qu’à son protocole de 1967 à laquelle le Bénin est partie prenante.

Mais cela ne semble aucunement gêner le régime de la Rupture, encore moins ses thuriféraires. Il y en a même, ministre-conseillère, qui se félicite de l’arrestation de Hugues Comlan Sossoukpè, sans faire allusion à la violation de son statut de réfugié. Cela ne devrait étonner personne. On se souvient que dans ce pays, un thuriféraire du régime, aujourd’hui ministre-conseiller, parlant d’une décision de la Cour constitutionnelle, avait dit qu’elle méritait juste d’être jetée à la poubelle. Les accords internationaux auxquels le Bénin est librement partie méritent-ils aussi d’être jetés à la poubelle, quand il s’agit d’enlever une voix critique dans un pays de la sous-région ?

M.M

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