Plusieurs fois député, Janvier Yahouédéou était surtout connu pour ses prises de position en faveur du respect de la Constitution, de l’état de droit et de la démocratie. La radio, dont il est le promoteur, est d’ailleurs connue pour sa lutte afin que les valeurs sus-citées soient pérennisées, notamment sous le régime Kérékou II, dont il a été un opposant farouche.
Ses livres Les Vraies Couleurs du Caméléon sorti en 2002, Crépuscule d’un dictateur sorti en 2004 et Etat d’urgence sorti en 2006 en sont les exemples. En 2013, Janvier Yahouédéou s’est opposé à toute révision opportuniste de la Constitution face à une volonté estimée de Boni Yayi de vouloir le faire à des fins personnelles. Avec une soixantaine de députés, ils ont créé le Mouvement Sursaut patriotique, lequel s’est illustré par un vaste plan de communication national dénonçant la révision opportuniste de la Constitution, notamment à travers la campagne emblématique des affiches “Touche pas à ma Constitution”. Mais ça, c’était avant.
La métamorphose
C’est en 2018 que Janvier Yahouédéou a adhéré au parti Bloc républicain, conformément aux nouvelles lois sur la réforme du système partisan. En 2019, il est élu député du Bloc républicain. Mandat renouvelé en 2023 avant d’être écourté, le titulaire Hervé Hêhomey ayant réclamé le poste, après sa sortie du gouvernement, toujours en conformité avec les nouvelles lois sur la réforme du système partisan. Mais jusque-là, même soutien de Talon, Janvier Yahouédéou n’avait jamais fait de déclarations qui remettent en cause son passé de défenseur de la Constitution, de l’état de droit et de la démocratie. Il a fallu qu’il soit promu ministre conseiller en charge des affaires économiques et du numérique avec cerise sur le gâteau, Coordonnateur du collège des ministres conseillers pour que le langage change de façon radicale. Depuis quelques jours, l’homme écume les plateaux télé pour louanger Patrice Talon. Chose normale, dira-t-on, puisque soutien du régime. Mais au point de faire l’apologie d’un autre mandat en violation de la Constitution ? Pourtant, c’est ce à quoi s’adonne le Coordonnateur du Collège des ministres conseillers. Pour lui, il n’est pas utile de vouloir que Talon quitte le pouvoir, tant qu’il fait bien. « Si vous ne laissez pas cet avion se stabiliser et que vous demandez au pilote de redescendre, ça va se crasher » avertit-il. Il va jusqu’à faire un parallèle avec la Chine. « Voyez-vous, cette Chine ne connaît pas de démocratie au sens occidental du terme. La Chine a choisi son modèle, le socialisme à la chinoise. Le président qui est en place peut rester tant qu’il respecte les règles et que le pays avance » laisse-t-il entendre.
De la part de celui qui défendait, dans un passé récent, le respect de la Constitution et de la démocratie, cela pose problème. On se demande s’il avait vraiment ces valeurs chevillées au corps? Le faisait-il juste parce qu’il était dans l’opposition ou c’est maintenant qu’il nous montre ses vraies couleurs?
