Président de l’Académie du Leadership, Auteur & formateur certifié, Sèdami Agbotoon évoque le pouvoir des écoles et universités dans la formation d’une nouvelle génération de leaders éthiques au Bénin.

Lire l’interview qu’il a accordée à Matin Libre

Matin Libre : Pourquoi est-il crucial aujourd’hui de former une nouvelle génération de leaders éthiques au Bénin ?

Sèdami Agboton : Le Bénin, comme de nombreux pays, est confronté à des défis qui entravent le développement économique et social. Former des leaders éthiques permet de bâtir une société plus juste, avec des décideurs capables de prendre des décisions alignées sur des valeurs morales fortes et d’œuvrer pour le bien commun.

Quel rôle spécifique les écoles et universités peuvent-elles jouer dans ce processus de formation de leaders éthiques ?

Les écoles et universités sont des lieux de transformation intellectuelle et morale. Elles ne doivent pas se contenter de transmettre des connaissances, mais aussi inculquer des valeurs éthiques et des compétences comportementales. Cela passe par l’intégration de modules sur l’éthique, le leadership responsable, et la citoyenneté dans les curriculums. Elles doivent également créer un environnement propice à l’apprentissage par l’exemple, où les enseignants eux-mêmes incarnent les valeurs qu’ils enseignent.

Pensez-vous que le système éducatif béninois est actuellement adapté à cet objectif ?

Pas totalement. Bien que des réformes aient été amorcées, le système reste encore très axé sur la théorie et les résultats académiques, au détriment de la formation humaine et morale. Il est urgent d’introduire une approche plus holistique, qui intègre le développement des soft skills, l’éthique et la pensée critique.

Quels sont les obstacles majeurs à cette réforme éducative pour former des leaders éthiques ?

Le principal obstacle est l’inertie du système éducatif, qui est souvent réticent au changement. Par ailleurs, il y a parfois un manque de modèles positifs à suivre parmi les élites, ce qui rend difficile l’instauration de standards éthiques crédibles.

Quels programmes spécifiques ou initiatives recommandez-vous pour atteindre cet objectif ?

Je recommande plusieurs initiatives :

  • L’intégration de modules sur l’éthique et la gouvernance dans tous les niveaux d’enseignement.
  • La mise en place de clubs de leadership et de responsabilité civique dans les écoles.
  • L’introduction de stages communautaires obligatoires pour les étudiants, où ils apprennent à résoudre des problèmes locaux tout en développant des compétences de leadership.
  • Des partenariats entre les universités et des organisations engagées dans l’éthique, la gouvernance, et le développement durable.

Comment évalueriez-vous l’impact des universités privées par rapport aux universités publiques dans ce processus ?

Les universités privées ont souvent plus de flexibilité pour innover, notamment dans leurs programmes pédagogiques. En partenariat avec l’Académie du Leadership que je dirige, certaines d’entre elles intègrent déjà des formations sur le leadership et les soft skills. Toutefois, les universités publiques, par leur envergure et leur rôle central, ont un impact potentiel beaucoup plus large s’il y a une réelle volonté de transformation.

Pensez-vous que les enseignants sont suffisamment formés pour jouer ce rôle de mentors dans la formation de leaders éthiques ?

Malheureusement, non. La formation des enseignants est souvent centrée sur les disciplines qu’ils enseignent, mais peu sur leur rôle de mentors ou sur l’inculcation de valeurs. Il est important de développer des programmes de formation continue pour les enseignants, afin de renforcer leurs compétences en matière de pédagogie éthique et de leadership.

Quel rôle les entreprises ou institutions privées peuvent-elles jouer pour soutenir ce projet ?

Les entreprises et institutions privées peuvent contribuer en établissant des partenariats avec les écoles et universités. Par exemple, elles peuvent financer des programmes de formation en éthique ou offrir des opportunités de mentorat et de stages axés sur des pratiques responsables. En agissant ainsi, elles investissent dans un vivier de leaders éthiques pour le futur.

Pouvez-vous citer un exemple concret où la formation éthique a fait la différence dans le leadership ?

Un exemple souvent cité est celui du Rwanda. Ces dernières années, le gouvernement a investi massivement dans l’éducation axée sur les valeurs civiques et éthiques, formant une nouvelle génération de leaders dévoués à la reconstruction du pays. Cela a permis d’instaurer une gouvernance plus responsable et de rétablir la confiance entre les citoyens.

Quel message voulez-vous adresser aux jeunes Béninois qui aspirent à devenir des leaders éthiques ?

À ces jeunes, je dirais : le leadership éthique commence par vous-même. Apprenez à reconnaître vos valeurs, à agir avec intégrité, et à toujours mettre l’intérêt collectif au-dessus de vos intérêts personnels. Le Bénin a besoin d’une génération de leaders capables de transformer les défis en opportunités. Soyez cette génération.

Propos recueillis par M.M

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