Pour Me Agbodjo, sa mise en liberté se heurte à la volonté politique de Talon
Ce 10 décembre 2024, cela fait 3 ans que l’Opposante au régime de Patrice Talon, Reckya Madougou, a été condamnée à 20 ans de prison. Invité sur France 24, son avocat Me Renaud Agbodjo a laissé entendre que la décision de sa mise en liberté, comme l’a exigé le Groupe de travail de l’Onu sur la détention arbitraire, se heure à la volonté politique du chef de l’Etat.
Ce 09 décembre, Me Renaud Agbodjo était l’invité du Journal Afrique de France 24. Au centre des préoccupations, le maintien en détention de l’Opposante Reckya Madougou, malgré l’avis 51/2022 du Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire qui demande sa libération immédiate. A la question de savoir pourquoi Reckya Madougou est toujours en prison, Me Renaud Agbodjo laisse entendre que ce 10 décembre, cela fait en effet 1371 jours de détention « arbitraire » pour l’ancienne Garde des sceaux. Le Groupe de travail qui a qualifié cette détention d’arbitraire est une émanation, une institution du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies auquel appartient le Bénin. Lequel a dit qu’il n’existe aucune preuve sur la culpabilité ou sur la participation de Mme Reckya Madougou dans une activité terroriste, donc a exigé sa libération. « Sauf qu’aujourd’hui, cette décision-là se heurte à la volonté politique du chef de l’État qui, nous pensons, ne souhaite pas pour l’instant transcender ses ressentiments à l’égard d’une opposante politique. Les contradictions électorales de 2021 sont derrière nous. Nous estimons qu’on ne peut pas aller à de nouvelles échéances électorales de 2026 si on ne fait pas le deuil des différentes contradictions électorales passées » fait savoir Me Renaud Agbodjo. Aux dires de l’avocat, Reckya Madougou a juste exprimé des opinions politiques. « Elle a exprimé une liberté qui lui est reconnue par le pacte civil et international sur les droits politiques. C’est tout le crime qu’elle a commis. Elle n’a pas commis un crime de sang, elle n’a pas commis un crime économique, elle a exercé une liberté que les autorités judiciaires, malheureusement, la Criet a qualifié de crime politique » laisse entendre Me Renaud Agbodjo.
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Se prononçant ensuite sur l’arrestation de Olivier Boco et Oswald Homeky, accusés de tentative présumée de coup d’Etat, Me Renaud Agbodjo estime que cela traduit un malaise au niveau de l’appareil étatique, une crise de confiance entre le chef de l’Etat et des gens de sa galaxie immédiate qui ont clairement affiché des intentions pour 2026. Pourtant Patrice Talon a dit qu’il ne va pas se représenter. Me Agbodjo trouve qu’entre le dire et le faire, il y a un fossé. Cependant, il compte sur la bonne foi du chef de l’État afin qu’il traduise cette promesse-là en acte.
Au sujet de la création du Cadre de concertation de l’opposition, Me Renaud Agbodjo estime que : « c’est une mobilisation citoyenne, politique, mais surtout démocratique, parce que nous estimons aujourd’hui qu’il y a une psychose, il y a une incertitude sur la crédibilité des élections générales à venir ». Et ce qui justifie cette incertitude, selon l’invité de France 24, c’est un code électoral qui ne permet pas de se projeter techniquement et juridiquement, puisqu’il est le résultat d’une stratégie d’usurpation de la souveraineté du peuple à travers l’instauration d’un mécanisme appelé l’accord de gouvernance. « Dans le cadre des élections législatives, pour bénéficier de l’attribution des sièges au prochain Parlement en 2026, il faut réunir 20% dans chacune des 24 circonscriptions électorales. Sauf que par le passé en 2023, aucun parti politique au Bénin n’a réussi cet exploit-là », a-t-il confié. L’autre chose qui justifie la crainte de l’Opposition, aucun parti de l’opposition n’est représenté dans les différentes instances qui organisent les élections. Les partis de l’opposition ne sont ni à la Céna, encore moins à la Cour constitutionnelle. Ils n’ont donc pas un œil sur l’organisation pratique des élections. « En plus de ce que les instances qui organisent les élections sont sous l’influence du régime exécutif, quel est l’intérêt de corser les conditions d’attribution des sièges au niveau du Parlement, s’il n’y a pas derrière une volonté d’usurper la souveraineté du peuple ? » se demande Me Renaud Agbodjo.
M.M