Du 10 au 19 Octobre 2024, l’équipe de Flowers CNSS a participé au 45e championnat d’Afrique des Clubs, Laayoune (Maroc) 2024. Une participation assortie d’un parcours historique auréolée d’une médaille du vice-champion d’Afrique. Le coach principal des Flowers CNSS, Aime SEBIO, dans un entretien exclusif, retrace le parcours de sa formation et relate les coulisses du parcours héroïque de Flowers CNSS.
‘’Si on gagnait le match contre Aspac (demi-finale contre Aspac), on allait inscrire Flowers (Homme) pour la Coupe d’Afrique’’
Déception, quand on perd une finale, mais de pouvoir attribuer la médaille de vice-champion, quel sentiment avez-vous eu ?
Aime SEBIO : « Merci ! Vraiment un sentiment de joie, parce que ce n’était pas gagné à l’avance. C’est vrai, nous avons eu les conditions de préparation. C’est vrai, nous avons eu les moyens. Mais se retrouver à ce niveau de la compétition, ce n’était pas jouer à l’avance. Vous savez, en toute chose, il faut l’expérience. Il faut avoir l’expérience, il faut participer de façon régulière. Flowers était en Tunisie en 2022. En 2023, on a participé à aucune compétition, aucune campagne africaine. En 2024, on a décidé de participer. Les dames étaient championnes, donc automatiquement, les dames étaient qualifiées pour participer. Donc, on était en plein championnat national, c’est à dire le championnat professionnel, (les play-offs) et on faisait notre match contre Aspac (demi-finale contre Aspac), quand l’information est arrivée. Comme quoi, si on gagnait le match là, on allait inscrire Flowers (Homme) pour la Coupe d’Afrique. Ça a été une source de motivation de plus pour les joueurs. On s’est battu jusqu’au bout et on a gagné Aspac. Et par chance pour nous, il y a une équipe angolaise, Inter, qui, à la dernière minute, a désisté. Et la Fédération a inscrit Flowers (Homme). Sinon, c’est Adjidja (Homme) et Flowers (Dame) qui étaient directement qualifiées pour la compétition. Donc, c’est comme ça qu’on nous a inscrits. Et puis, on a fini le championnat, on a donné quelques jours de repos aux joueurs et on les a mis au vert. C’est d’ailleurs, ce qui a donné le résultat. On savait ce que les joueurs mangeaient, on était sûr que les joueurs étaient au repos, (à la récupération). On a fait une planification d’entraînement pour leur permettre de récupérer davantage. Franchement ! C’est pour ça que je remercie tous ceux qui nous ont accompagnés pour la réussite de cette campagne. Franchement, ça n’a pas été facile, ce n’est pas gagné à l’avance. Et il faut avouer que nous avons une très belle équipe. »
‘’Aujourd’hui, le handball, ce n’est plus un simple jeu. Non, ce sont des schémas’’
Comment transmettez-vous votre expérience aux joueurs qui n’ont pas forcément l’expérience que vous avez ? Parce qu’avoir l’expérience en tant que coach, c’est une chose, mais transmettre cette expérience-là, faire vivre cette expérience-là, enfin transcender vos poulains, c’est un autre travail.
Aime SEBIO : « Première des choses que vous avez dit, moi, j’ai déjà l’expérience-là. C’est déjà gagné à 50%. Les 50% qui restent, c’est de permettre aux joueurs de suivre ces matchs-là, c’est de discuter avec eux, d’échanger beaucoup avec ces joueurs. Et je peux vous avouer que ces joueurs aussi ont beaucoup d’expérience. C’est des joueurs qui ont joué beaucoup de temps en équipe nationale, qui ont fait beaucoup de voyages. Aujourd’hui, ils mettent au service de Flowers cette expérience-là. Ce n’est pas de petits joueurs, ils ne sont pas des moindres. Ils ont aussi l’expérience. Mais qu’est-ce qui se passe ? Tout se passe à l’entraînement. L’entraînement, vous mettez en place les schémas tactiques, d’accord ? La stratégie que vous devez adopter en défense, les stratégies que vous devez adopter en attaque, les systèmes de jeu, c’est ça qu’on appelle les stratégies, les systèmes de jeu en attaque. Aujourd’hui, le handball, ce n’est plus un simple jeu. Non, ce sont des schémas. Vous mettez ces schémas en place. Vous arrivez au match. Mais en amont, le coach a eu le temps d’aller sur le site de la CAHB. C’est pour ça qu’aujourd’hui, on remercie la CAHB. Le coach a eu le temps d’aller sur le site de la CAHB et a suivi un peu les matchs des équipes que nous devons rencontrer. Pour étudier leur jeu et mettre en place des stratégies pour aller contre leur manière de jouer. C’est ce qui s’est réellement passé. »
‘’Nous sommes rentrés dans la compétition, tout confiant’’
Aime SEBIO : « Nous sommes rentrés dans la compétition, tout confiant. Tout confiant parce que quoi ? On était à Niamey pour la Coupe d’Afrique des vainqueurs de coupe. On a rencontré l’équipe de FAP qui nous a gagnés dans les dernières minutes, 2 buts d’écarts. On est revenu en Tunisie (Coupe d’Afrique des clubs champions en Tunisie), on a rencontré en match de classement la même équipe de FAP que nous avons gagnée par 10 buts de quart. C’est resté dans la tête des joueurs que notre effectif qu’on avait cette année pouvait taper l’équipe de FAP là sans problème. Oubliant que, première des choses, FAP a renforcé son équipe. Deuxième des choses, FAP a gardé en tête cette défaite-là. Et FAP est venue avec un mental de nous mettre à terre. Pour la revanche ! On est allé à la mi-temps, 2 kilomètres (2 buts d’écarts). On menait FAP (15-13), on est allé à la mi-temps. On est revenu. Ils ont changé leur dispositif. Nous avons changé aussi notre dispositif. Mais la différence, c’est quoi ? Au niveau de mes joueurs, il n’y avait pas l’efficacité. On fait tout. On met la défense de FAP Out, on va au tir, ou ça tape le poteau, ou c’est le gardien qui arrête, ou bien c’est le ballon qui va dehors. Parce qu’en deuxième mi-temps, on a mené FAP jusqu’à 6 buts d’écarts. Et personne ne pourrait s’attendre à ce résultat. Que ce soient les joueurs, que ce soit l’encadrement, nous endossons cette responsabilité. Mais nous avons fini le match égalité au score (27-27). Et quand Dieu veut te donner raison, et quand Dieu veut t’amener loin, il faut que ça se passe comme ça, pour que les joueurs puissent prendre conscience de l’enjeu. »
La réunion de crise
Aime SEBIO : « Après ce match nul que nous avons considéré comme une défaite, il y a une séance d’échange. Pas pour sermonner les joueurs, mais pour attirer leur attention sur le fait que nous sommes en train de courir un danger. Les objectifs que nous nous sommes assignés au départ de Cotonou, si on continue comme ça, on ne pourra pas atteindre les objectifs. Donc on a échangé, puisque ce ne sont pas des petits joueurs, on a échangé, on a attiré l’attention des uns et des autres. Quand on est dans notre temps fort, il faut vraiment profiter. Quand on rentre dans notre temps faible, il faut laisser l’encadrement leur dire ce qu’ils doivent faire, pendant que nous, nous sommes dans notre temps faible. C’est ça la gestion de match ! Le temps fort, les joueurs s’expriment comme ils veulent. Mais dès qu’on rentre dans le temps faible, c’est à nous, à travers peut-être un temps mort, ou bien à travers des consignes par le demi-centre, ou bien par le responsable de la défense de placer les consignes. C’est quand ça ne va pas du tout qu’on passe au temps mort. Donc, c’est pour ça que je dis, quand bien même contre le Cameroun, on a pris le temps mort, on a géré comme cela se doit. Mais malheureusement, on n’a plus la main. On est resté aussi longtemps que possible dans notre temps faible. Après les temps morts que nous avons demandés, on est resté toujours dans le temps faible. Mais on a fini le match nul. Ça nous a inquiétés un peu. Donc, ça nous a poussés à convoquer cette réunion, qu’on peut appeler de crise. Voilà, on ne s’est pas insulté. Et c’est le moment aussi de remercier Sina Isidore, capitaine de l’équipe, qui a su jouer un très, très grand rôle, très, très grand rôle de remobilisation de groupe. Moi, j’ai échangé avec les joueurs. À un moment donné, les joueurs ont dit, ils souhaiteraient que je quitte, ils vont échanger entre eux. J’ai dit, ah, quand c’est comme ça, c’est positif. Si les joueurs décident d’échanger entre eux, c’est positif. Donc, les joueurs ont échangé. Après, il y a un groupe qui est allé me voir pour dire, ils veulent me rencontrer. Et qu’ils veulent me demander de les excuser pour ce qui s’est passé. Et que les choses vont entrer dans l’ordre. Ce n’est pas facile de jouer contre une équipe du pays organisateur. Ce n’est pas facile. Le public, la salle était pleine, complètement acquise à la cause du club local. Et c’était notre deuxième match. La chance que nous avons, et c’est pour ça que je dis, si Dieu veut te donner quelque chose, tu peux être tranquille, Dieu va te donner ça. Nous, nous avons fait notre match nul contre FAP. FAP -Flowers, match nul. De l’autre côté, Raja contre Don Bosco de la Côte d’Ivoire, match nul. Ça veut dire que dans notre poule, tout est relancé. Deuxième match, Flowers joue contre Raja. Raja, c’est l’équipe vice-championne du Maroc. Flowers joue contre Raja, c’est là que mes joueurs m’ont montré qu’ils ont vraiment pris conscience. … J’ai senti une équipe complètement transcendée entre la première rencontre et la deuxième. Du début jusqu’à la fin, l’équipe était dangereuse dans tous les compartiments. La belle preuve, on a fini ce match, 17 kilomètres (17 buts d’écarts) 37- 20. Et ça nous a mis maintenant en confiance parce qu’on a commencé, match nul ici, match nul de l’autre côté. À la fin, il faut tenir compte des goal-averages. Donc on a fait 17 kilomètres. Ça veut dire qu’on s’est retrouvés à 3 points plus 17. On a attendu le match de FAP. FAP a joué contre Don Bosco et a gagné Don Bosco 2 buts d’écarts. FAP se retrouve à 3 points. Goal-averages plus 2. Ce sont les derniers matchs, là, qui doivent départager. Mais là où nous avons moins de chance, je dirais moins de chance, que l’équipe de FAP, c’est que nous, on joue contre Don Bosco, qui n’est pas une petite équipe, pendant que FAP joue contre l’équipe que nous avons gagnée, 17 buts d’écarts. Donc, FAP est allée, au lieu de se calmer, ils se sont précipités et au finish, l’équipe de Raja a tapé FAP pendant que nous, on a tapé l’équipe de Don Bosco, 12 kilomètres (33-21). On s’est retrouvé à 5 points plus 39, pendant que l’équipe qu’on espérait être deuxième, qui est FAP, s’est fait taper. Et c’est Raja qui s’est retrouvée en deuxième position. Donc, nous avons fini le premier de notre poule. On a eu un jour de repos, ce qui nous a fait beaucoup plaisir. »
‘’70% du monde du handball ne croyaient pas qu’on serait au second tour’’
Au final, là, les choses deviennent sérieuses, la pression monte, le niveau de jeu aussi augmente. Et il a dit, en demi, c’est une équipe qui joue à domicile. Tout ça, vous avez le public contre vous. Racontez-nous ces moments également.
Aime SEBIO : « Avant de raconter ces moments, je voudrais vous dire qu’en partant de Cotonou, on s’est assigné comme objectif : minimum, ‘’aller au second tour’’ et maximum ’’aller en demi-finale’’. Mais le monde du handball au Bénin, 70%, compte tenu de notre poule, qui n’est pas facile à jouer, beaucoup n’y croyaient pas. 70% du monde du handball ne croyaient pas qu’on serait au second tour. Parce que notre poule, ce n’est pas facile à jouer. Franchement, elle est relevée. Don Bosco (Cote d’Ivoire) participe régulièrement à la compétition. C’est des expérimentés de la compétition. Raja, l’équipe vice-championne du Maroc, ce n’est pas facile à jouer. FAP, pas des moindres sincèrement. Et pour avoir une bonne côte, pour avoir des équipes plus ou moins jouables, il faut être dans le chapeau 1 ou 2. (Vous voyez, Flowers est allé en finale maintenant. D’accord ? Pour la prochaine compétition, on serait chapeau de poule. Et le tirage ? Dès que tu deviens chapeau de poule, le tirage est facile pour toi. Mais quand tu n’es pas chapeau de poule, tu hérites des grands. Nous, on a été classé quatrième dans notre poule. Ça veut dire quoi ? On est des moindres dans notre poule. C’est ce que ça veut dire. Ça tient compte de combien de fois tu participes. Ça tient compte de tes performances au cours de la compétition. Adjidja était chapeau. Parce que Adjidja est allé en quart de finale. Très belle équipe d’Adjidja aussi). Donc, on est parti de Cotonou, quand bien même, on ne maîtrisait pas beaucoup de choses, on s’est donné l’objectif. Parce que l’effectif que j’ai, le niveau de mes joueurs, je dis, tout est jouable. On est allé, on a fini les matchs de poule, on a fini premier de poule. »
Le Defi du quart de finale
Aime SEBIO : « Quart de finale, contre l’équipe du Congo, Étoile du Congo, habituée aussi de la compétition. Je suis très ami à leur président, qui m’a laissé un message la veille du match, et a dit ceci : ‘’Aime, tu as une très bonne équipe, mais ton aventure s’arrête demain. J’ai dit, président, avec tout le respect que j’ai pour vous, je vous tape minimum 10 buts d’écarts. Je lui ai dit ça. Parce que j’ai eu le temps de suivre leur match en direct et de suivre leur match sur le site de la Fédération. J’ai dit, Président, moi, je vais te taper 10 buts d’écarts. Il dit, si tu me gagnes 10 buts d’écarts, moi, je te donne 1 000 dollars. Pas de problème. Et le défi, était ainsi lancé. Le match a commencé. Très belle équipe du Congo. Très belle équipe avec un très bon gardien de but, qui, dans les 5-10 premières minutes de match, nous a mis en situation douteuse. Il enlevait tous les ballons. Et les joueurs, j’ai appelé les joueurs, je leur ai dit, par rapport à ces gardiens de but qui sont très réactifs sur les premières balles, comment il faut tirer. (Il faut faire des tirs de deux temps. Garder un peu la balle avant de libérer). Donc, ils ont mis ça dans leur tête. Ils ont commencé par développer des tirs de deux temps, c’est comme ça qu’on a pris l’avance. On est allé à la mi-temps, 6 buts d’écarts. Je tais, ce que le président m’a dit à la mi-temps. Je tais ça parce que c’est un peu intime. Ça m’a fait rire. On a abordé la deuxième mi-temps. On les a pris jusqu’à 6-7 buts d’écarts en deuxième mi-temps. Donc, après, c’est quand même un quart de finale. À 5 minutes de la fin, on a diminué la dose. On les a ramenés un peu. Ils ont cru qu’ils pouvaient faire quelque chose. On a encore mis un peu le rouleau. Et on a fini 9 buts d’écarts. On les a gagnés 9 buts d’écarts, finalement. »
Après notre quart de finale, on a eu encore un jour de repos, ce qui nous a fait du bien.
Maintenant, c’est le plus dur. Première des choses, il faut jouer contre le pays organisateur encore. Deuxième des choses, il faut jouer contre l’équipe championne du Maroc, Moutada. Troisième des choses, il faut jouer contre le public. Nous y reviendrons dans la partie 2
Jeraud LANGANFIN GLELE