14 ans après la disparition de Pierre Urbain Dangnivo, les langues semblent enfin se délier. La toute dernière déclaration de l’ancien Directeur Général de la Police nationale vient, si besoin est encore, corroborer la thèse d’une potentielle erreur sur la personne des présumés coupables en détention dans les maisons d’arrêt et privés de liberté, tout ce temps.
Dans un entretien publié le 25 octobre par le web média GRAND REPORTER BENIN, Louis-Philippe Houndégnon affirmait ceci :
« Dans l’affaire Dangnivo, je puis vous garantir que ce qui a été fait, c’est qu’il y a eu politisation du dossier. Et c’est ce que je demande aux amis d’en face. Les gens ont critiqué et ont estimé que rien n’a été fait, que tout a été mal fait dans cette affaire. Ils sont là depuis près de 9 ans maintenant, et le dossier n’a pas bougé. Qu’on nous montre réellement les assassins de Dangnivo ! Parce que ce que vous ne savez pas, moi j’ai suivi ce dossier Dangnivo sérieusement quand j’étais en fonction, et j’avais milité à l’arrestation de l’un des assassins qui étaient en fuite. Vous savez qui c’est ? C’est quelqu’un que j’ai interpelé déjà dans un dossier d’assassinat et de cambriolage de la Pharmacie SoPhaBe à l’époque et qu’on a ramené de Lomé mais après il s’est réfugié au Nigeria, et je ne sais plus là où il se trouve aujourd’hui. »
Et au fonctionnaire de Police renvoyé d’office à la retraite de s’interroger : « Mais qu’est ce qui empêche le gouvernement de travailler à retrouver l’assassin de Dangnivo ? »… « L’administration est une continuité… On ne va pas raisonner toujours facilement…Non !!! », conclut-il.
Conjectures et interrogations ???
Les propos de ce Haut Fonctionnaire de la Police béninoise, désormais admis à la retraite, font froid dans le dos et interpellent les autorités judiciaires à l’effet d’agir au plus vite dans le sens d’une clarification rapide et conséquente des éléments de l’enquête ayant abouti à la mise sous mandat de dépôt des deux jeunes interpelés et dont les procès en cour d’assises, n’ont jamais pu aboutir à une sentence légalement motivée. Deux fusibles qu’on a peut-être pu disjoncter, en tenant compte de la situation sociale très tendue et au bord de l’implosion en 2010, mais qu’il faut à présent vite élucider.
Louis-Philippe Houndègnon évoquant le dossier parle d’un individu (repris de justice ndlr) qu’il avait travaillé à faire arrêter dans un autre dossier de cambriolage et d’assassinat. Qu’est donc devenue cette ‘’excellente piste’’ de l’ancien Ministre de la justice qui désigna Alofa et Amoussou comme les coupables tout trouvés. Deux jeunes qu’on aurait pu passer à la guillotine si le Bénin n’était pas un Etat démocratique respectueux des droits de l’Homme.
Les propos du Sieur Houndègnon doivent être pris au sérieux, pour éviter une détention continue et hors délai raisonnable aux deux jeunes béninois privés de liberté depuis 14 ans et traités comme des criminels.
Quid a fortiori des deux décisions déjà rendues par la Cour Constitutionnelle dans ce dossier ? Les DCC 20-029 DU 23 JANVIER 2020, laquelle dit qu’il y a violation du droit d’être jugé dans un délai raisonnable, et la DCC 21-314 DU 09 DECEMBRE 2021 qui stipule que les autorités judiciaires en charge de la détention de monsieur Kossi Kodjo ALOFA ont violé la Constitution, ne semblent guère émouvoir aucune institution de la République, encore moins l’autorité judiciaire alors même que la Constitution béninoise a prescrit que « les décisions de Cour Constitutionnelle sont sans recours et s’imposent à tous »
Le Bénin, maintenu au sein du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU, devra jouer sa partition afin que les personnes injustement ou accidentellement détenues dans le dossier Disparition présumée de Dangnivo, et qui croupissent dans les prisons hors délai raisonnable, puissent recouvrer leur liberté d’aller et de venir.
Il en va ainsi des principes généraux et élémentaires de Droit pénal enseignés dans les facultés et qui sont vantés dans les Grandes Démocraties…