(Un adolescent sur sept souffrirait d’un problème de santé mentale)
A l’occasion de la célébration de la Journée mondiale de la santé mentale, le Directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (Oms) a lancé un message important quant à la santé mentale des enfants. A l’en croire, il urge d’en faire une préoccupation majeure.
« Depuis le début de la guerre civile au Soudan en avril dernier, près de 680 000 réfugiés ont traversé la frontière vers le Tchad en quête de nourriture et de sécurité. Ils font partie des trois millions de Soudanais qui ont fui leur pays. J’ai rencontré des mères avec leurs enfants serrés dans leurs bras, ils avaient marché pendant des jours pour atteindre la frontière, ils avaient faim, étaient fatigués, seuls, effrayés. Ils nous ont raconté des histoires horribles. Leurs maisons ont été incendiées, leurs récoltes ont été détruites, leur bétail a été volé. Il est choquant de constater que près de 70 % des réfugiés qui ont traversé la frontière entre le Soudan et le Tchad sont des enfants, dont beaucoup d’adolescents fuyant la détention arbitraire ou le recrutement forcé. Peu de temps après l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie en 2022, je me suis rendu en Ukraine. J’ai également visité un centre d’accueil pour réfugiés en Pologne, où j’ai rencontré une mère originaire de la région de Marioupol, qui m’a dit que lorsque les bombardements ont commencé des bombardements intenses sa fille avait très peur. Sa mère lui a dit : « ne t’inquiète pas, ce n’est qu’un orage, cela passera. Mais ce n’était pas le cas, il s’agissait d’un bombardement ». Je n’arrive pas à imaginer les conséquences à long terme pour la santé mentale des enfants au Soudan, en Ukraine, à Gaza, à Haïti, au Liban, en Syrie, au Yémen y compris dans mon propre pays, l’Éthiopie, ou d’autres régions de notre monde en proie à des troubles“ a déclaré le Directeur général de l’Oms.
Absence de services de santé mentale dédiés aux enfants…
Le Directeur général de l’Oms a, par ailleurs, déploré l’indisponibilité des services de santé mentale dédiés aux enfants dans la plupart des pays concernés. Une situation qui s’est aggravée avec les conflits. “Et les conflits ne représentent qu’une menace parmi d’autres pour la santé mentale des enfants et des adolescents du monde, notamment l’impact persistant de la pandémie de Covid-19, la pauvreté, la violence, le cyber-harcèlement et la crise climatique. Faut-il s’étonner que nos enfants et nos adolescents souffrent plus de maladies mentales que jamais auparavant ? En effet, un adolescent sur sept souffrirait d’un problème de santé mentale. La dépression, l’anxiété et le trouble des conduites… figurent parmi les principales causes de morbidité et de handicap à l’adolescence, et le suicide est l’une des principales causes de décès chez les 15-29 ans des deux sexes. Et pourtant, en moyenne, les pays consacrent moins de 2 % de leur budget de santé à la santé mentale, et les services destinés aux enfants et aux jeunes ne représentent qu’une faible proportion de ce budget. La santé mentale est véritablement sous-financée. Dans les pays à revenu faible, on compte moins d’un agent spécialisé dans la santé mentale de l’enfant pour dix millions d’habitants. Même dans les pays à revenu élevé, les services destinés aux jeunes sont souvent difficiles d’accès, répartis de manière inégale et de qualité variable“ a-t-il déploré.
Des efforts consentis…
La lueur d’espoir semble résider dans le fait que davantage d’attention soit portée à la santé mentale et les efforts de sensibilisation de plus en plus importants. “Par exemple, l’Oms collabore avec l’Unicef dans le cadre d’un programme conjoint pour la santé mentale et le bien-être et le développement psychosociaux des enfants et des adolescents, auquel participent actuellement 13 pays. Lors de l’Assemblée mondiale de la santé qui s’est tenue cette année, les États membres de l’Oms ont également adopté une résolution sur l’intégration de la santé mentale et du soutien psychosocial dans la riposte aux urgences, y compris les conflits armés. Par ailleurs, l’Oms intègre de plus en plus la santé mentale dans ses propres opérations de riposte aux urgences, notamment en Afghanistan, en Éthiopie, au Soudan, en Syrie, en Ukraine et au Tchad. Par exemple, depuis 2022, avec le soutien de l’Oms, l’Ukraine a mis en place un conseil de coordination intersectoriel pour la santé mentale sous l’égide du Premier ministre et a lancé un programme national de santé mentale et de soutien psychosocial supervisé par la Première dame du pays, Mme Olena Zelenska. Je l’ai rencontrée l’année dernière, et son engagement en faveur de la santé mentale est très fort, et j’apprécie son rôle directeur dans ce domaine. L’Oms et ses partenaires coordonnent plus de 280 organisations qui assurent un soutien psychosocial et en santé mentale en Ukraine. Même lorsque la guerre prendra fin, les enfants ukrainiens resteront traumatisés, tout comme les enfants de Gaza, du Liban, du Soudan et d’ailleurs. Il est indispensable d’apporter un soutien à ces enfants maintenant et dans le futur“ a-t-il témoigné avant de faire savoir qu’il n’y a pas de santé sans santé mentale.