Dans les ruelles animées des villes béninoises, il devient de plus en plus rare de croiser des visages ornés de scarifications faciales et raciales, ces marques distinctives qui, autrefois, définissaient l’identité communautaire et culturelle de nombreuses ethnies du pays. Ce déclin, symptomatique d’une modernité galopante, suscite aujourd’hui autant de curiosité que de nostalgie.

Les scarifications faciales et raciales, connues localement sous le nom de « balafres », ne sont pas de simples ornements. Pour beaucoup, elles sont une véritable carte d’identité. Au-delà de leur rôle esthétique, ces marques portaient une signification profonde. Elles étaient le reflet d’une appartenance communautaire, un moyen de se prémunir contre les maladies, les envoûtements et même, selon certaines croyances, les morts subites. Ainsi, les cicatrices inscrites sur la peau étaient aussi bien des symboles de protection que de fierté ethnique.

Cependant, la modernisation de la société béninoise et l’influence croissante des normes occidentales ont conduit à une stigmatisation progressive de ces pratiques. Les porteurs de scarifications sont souvent objet de railleries, perçus comme des vestiges d’un passé révolu dans un monde qui valorise l’uniformité et la discrétion. Un cadre de l’administration publique, ayant souhaité garder l’anonymat, confie : « Ces scarifications sont pour moi les traces de mon identité et de mon origine, mais aujourd’hui, elles suscitent plus de moqueries que de respect. »

Pour les Haoussa du Nigeria, pourtant, ces marques demeurent un motif de fierté. « Ces balafres permettent de nous identifier. Nous sommes Béninois, et cela révèle nos origines », expliquent-ils avec assurance. De même, chez les Otamaris de Boukoumbé, ces cicatrices restent des symboles identitaires forts, ancrés dans une tradition séculaire. « Ces marques sont authentiques. Elles racontent notre histoire, nos origines », soulignent-ils.

Néanmoins, ce sentiment n’est pas universel. Nombreux sont ceux qui dénoncent ces pratiques comme étant obsolètes, voire barbares. « C’est une manière avilissante de marquer les gens au nom de la culture », affirme un critique. Cette opposition remet un débat plus large sur la place des traditions dans une société en mutation.

En dépit de leur raréfaction, les scarifications faciales et raciales continuent de marquer les esprits. Pour les plus anciens, elles demeurent des témoignages vivants d’une identité collective forte, tandis que pour les jeunes générations, elles sont souvent perçues comme des reliques d’un passé révolu. Ce clivage reflète un enjeu crucial : comment préserver une culture en mutation sans trahir ses racines ?

Les scarifications raciales au Bénin sont ainsi à la croisée des chemins, entre attachement aux traditions et désir de modernité. Leur disparition progressive soulève des questions sur l’avenir de ces pratiques ancestrales et sur la manière dont les Béninois souhaitent se définir dans un monde en perpétuelle évolution.

Jolidon HOUNKPATIN (Stg)

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