Si, sous d’autres cieux, les homosexuels peuvent vivre leur sexualité sans aucune inquiétude, la société béninoise ne semble pas encore prête de tolérer l’homosexualité. Et ceci, malgré les initiatives des organisations de la société civile appelant au respect de leur orientation sexuelle. Votre journal Matin Libre a rencontré un jeune homosexuel béninois âgé de 19 ans seulement. Pour des raisons de sécurité et au regard du caractère sensible du sujet, son identité n’est pas dévoilée. Lire le témoignage de Roméo (nom d’emprunt), jeune gay vivant au Bénin !
Comment avez-vous découvert votre orientation sexuelle ?
Je l’ai découvert à l’âge de 08 ans et je suis passé à l’acte sexuel pour la première fois à 15 ans. C’est devenu ma philosophie. J’ai fréquenté Père Aupiais (Collège), j’ai connu des jumeaux et on est très vite devenu pote avec le grand frère. C’était le grand frère qui était aussi gay et tous les jours à la fin des cours, j’allais chez eux. Cela suscitait déjà la curiosité de leur grande-sœur qui m’insultait à chaque fois qu’elle me voyait ensemble avec ses frères. Un mercredi, j’étais comme à mon habitude chez eux et on jouait au jeu de « papa et maman ». Et c’était toujours moi qui jouais le rôle de maman. Donc ce jour-là, il a demandé qu’on joue et qu’il sera l’époux et moi l’épouse. Et il a préparé un lit pour nous deux. Nous nous sommes installés et nous avions commencé les attouchements. C’était la première fois où j’ai failli passer à l’acte avec quelqu’un du même sexe que moi. Bien que j’étais effrayé de ce qui s’était passé, j’avais senti du Plaisir…Et après, j’ai connu un blanc, c’est lui qui m’a fait découvrir cela pour la première fois à l’âge de 15 ans. Et j’y ai pris goût. Cette envie existe en toute personne. Par exemple, au beau milieu de ton sommeil, tu sens que quelqu’un te suce les parties intimes et tu te mets en érection. Et au moment de jouir, tu vois que c’est un garçon comme toi… Je ne pense pas que tu vas refuser de passer à l’acte et le rejeter. Certains pourront accepter de le faire sous prétexte que c’est la première et la dernière fois. Ils ne le font plus effectivement. Mais l’envie reste là et au fil du temps, la personne finira par rencontrer avec qui, il se sentira bien et c’est de là que naissent les bisexuels.
Dans une société africaine notamment au Bénin où les homosexuels ne sont visiblement pas les bienvenus, comment arrivez-vous à vous assumer et à gérer les regards intimidants ainsi que les stigmatisations ?
Déjà moi, je m’en fous! Je ne regarde pas les autres pour poser mes actes. Je ne me dis pas que ce que je fais n’est pas bien. Je fonce toujours droit dans ce que je fais. Donc pour répondre à cette question, honnêtement je m’en fous parce que je n’ai pas demandé (à être homosexuel). C’est juste inné en moi. Donc je continue toujours dans le même rythme peu importe les obstacles que je dois affronter pour montrer que je ne suis pas un faible mais un homme fort à ma manière. Et là j’impose le respect à toute personne qui collabore avec moi.
Un mot à l’endroit des homosexuels qui n’arrivent pas à s’assumer comme vous ?
Quand tu sais que tu n’as pas de contraintes et que tout va bien avec les parents et ils comprennent vite, là tu t’assumes. Les parents sont là pour supporter peu importe les polémiques comme le dicton le dit: « lorsqu’un individu n’est pas capable de dormir à même la rosée, il n’a qu’à s’abstenir de dire qu’il veut devenir fou ». Ce qui voudra dire que si tu sais que tu ne peux pas supporter les polémiques, les injures, je crois qu’il ne faut jamais s’assumer bisexuel en Afrique, c’est difficile. Donc il faut avoir le cœur, le cran de s’assumer pour montrer que tu l’es vraiment et ne pas avoir honte. Moi qui suis ici, je suis prêt à embrasser mon homme devant tout un public. Honnêtement je m’en fous, je considère que c’est mon homme et je suis sa femme…je ne peux pas prendre en compte l’opinion des autres sur mes choix. Non non.
Propos recueillis par Larysson KOKODOKO (stag)
