L’immense réussite du colloque organisé par le clergé catholique sur le code électoral récemment voté et promulgué, a été assurée par des intervenants à l’expertise éprouvée au Bénin et sur le continent. Certains parmi eux ont d’ailleurs été d’éminents précurseurs de l’ex Cellule d’Analyse des Politiques de l’Assemblée Nationale (Capan¬¬¬) aujourd’hui Institut Parlementaire du Bénin (Ipab). Mais les successeurs de Mgr Isidore de Souza de vénérée mémoire, ont été proprement vitriolés par des plumitifs à gage, sur ordre d’un establishment politique sourd à toutes les sonnettes d’alarme.
Au Bénin, berceau des conférences nationales africaines, l’archevêque émérite Antoine Ganye se croyait autorisé à marcher sur les pas de son illustre prédécesseur de Souza. Le prélat catholique, sans doute emporté par la qualité des interventions du Professeur Guèdègbé, de Mme Célestine Zannou Wétohossou et autres Francis Lalèyè et Mathias Hounkpè, n’est pas allé du dos de la cuillère pour inviter le pouvoir de la Marina à s’interdire tout excès. Mais il aura appris à ses dépens que l’humilité prouvée par feu le Général Mathieu Kérékou n’est pas une qualité laissée en héritage institutionnel à tous les présidents d’après. Ayant définitivement posé les bases de la démocratie béninoise par son sens de l’écoute et du droit à la différence, il mérite amplement d’être porté en triomphe, fut-ce à titre posthume. C’est à raison qu’au cours de ce colloque, Me Robert Dossou a rappelé un trait de caractère qui fit du Général, un homme d’exception : son respect pour l’opposition, composée de Béninois dont il était tout autant porteur des aspirations, que de celles de ses propres partisans politiques comme d’autres citoyens non affiliés à un quelconque parti, mais qui ne voulaient que du bien et du bonheur de vivre ensemble pour le Bénin.
L’Eglise catholique, régulièrement appelée au secours et en médiateur des crises politiques dont le Bénin a souvent été prisonnier, s’est donc cru bien inspirée d’anticiper son rôle de sapeur-pompier en convoquant son colloque sur le code électoral. Mais ce dernier a été l’offense de trop et le crime de lèse-magistère. Mal lui en a pris. Des médias ont été commis à la mission de vouer le clergé et ses prélats aux gémonies, en soutien à des opportunistes politiques d’apparition récente qui, sans succès électoral méritoire ni référence doctrinale, se sentent qualifiés pour corriger les « erreurs de la Conférence nationale ». Si dans les années 90, les journaux-cultes Tam-Tam Express et la Gazette du Golfe s’étaient laissés à une telle corruption, le sort de la démocratie béninoise en aurait été irrémédiablement dévié. On n’aurait pas profité du charisme de Mgr de Souza qui aurait été renvoyé à ses homélies. Heureusement, le pouvoir de l’époque n’avait pas commis la presse à une si basse besogne contre rémunération allègrement qualifiée par certains aujourd’hui de « gombo », dont il ne faut jamais oser les priver.
Pourtant, tout le monde sait que le clonage ourdi à l’Assemblée nationale à travers le nouveau code électoral n’attend que l’heure de son explosion programmée. On pourra alors convenir de solutions d’urgence, de mesures rectificatives ou de lois explicatives. Ce dont on est sûr, c’est que les artisans de cette œuvre savent où ils mènent le pays, sans que cette destination ne soit avouée. Le président Talon n’a plus aujourd’hui de raisons de s’en cacher. A deux ans de la fin du second et dernier quinquennat, l’enjeu majeur de son action est de perpétuer la carte politique qu’il a dessinée en huit ans de réformes. Mais au-delà des menaces, des chantages et des insultes, l’Eglise catholique devra rester fidèle à son devoir religieux d’être toujours disponible et attentive aux évolutions vers lesquelles les députés de la majorité présidentielle et le chef de l’Etat conduiront le pays au moyen de ce code, cette équation à plusieurs inconnues.
Angéla IDOSSOU