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Flambée du prix du maïs: Ce que le gouvernement ne dit pas !

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Quelles sont les raisons justifiant la hausse vertigineuse du prix du maïs au Bénin ? La question taraude les esprits des béninois depuis quelques jours. Et l’intervention d’un cadre du ministère de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche (Maep) notamment le Chef du programme maïs de l’Agence territoriale de développement agricole (Atda2) sur les raisons de la hausse du prix de ce produit vivrier semble laisser les béninois sur leur faim. Des investigations de votre journal, il ressort que l’une des principales raisons n’a toujours pas été évoquée…

Le prix du maïs oscille depuis quelques semaines entre 400 et 450 FCFA sur le marché béninois. Une réalité inadmissible pour certains béninois qui s’interrogent sur les principales raisons d’une telle flambée de prix dans un pays producteur comme le Bénin. Dans une intervention sur bip radio, le Chef du programme maïs de l’Agence territoriale de développement agricole (Atda2) a apporté des clarifications. Selon Yves Hountondji, la flambée du prix du maïs est due à une combinaison de facteurs internes et externes. A l’en croire, des commerçants ayant constitué d’importants stocks lorsque le maïs était moins cher ont contribué à la situation actuelle. Plus important, grâce à des projets-programmes visant le développement des producteurs, des systèmes de préfinancement et de surveillance des prix ont été mis en place, ce qui a entraîné une pression sur la production au niveau des producteurs. « Ces derniers ont mis en place des systèmes tels que des magasins où des stocks sont mis dedans », a-t-il expliqué. « En ce qui concerne les facteurs externes, Yves Hountondji a mentionné que la forte demande de maïs pour l’alimentation humaine et animale dans d’autres pays tels que le Niger, le Nigéria, le Burkina Faso et le Tchad a exercé une pression supplémentaire sur le marché béninois. Ces pays, ayant fait face à des déficits de production, se sont tournés vers le Bénin pour s’approvisionner en maïs, ce qui a créé une concurrence accrue et une augmentation des prix. Entre autres raisons, il a également évoqué des perturbations climatiques, notamment des retards et des excès de pluie. Il a, par ailleurs, admis que la production n’a pas diminué au point de compromettre la satisfaction des besoins en maïs.

Chose curieuse, plusieurs sources paysannes s’accordent sur la disponibilité et l’accessibilité des engrais comme l’une des principales raisons de cette flambée du prix du maïs au Bénin.

Ce que le gouvernement n’a pas dit…

Dans une note de service en date du 16 février 2024 et portant modification du prix au comptant du Npk (engrais) coton ou maïs, la Société de développement du coton (Sodeco) a procédé à l’ajustement du prix de vente de ses intrants agricoles. Selon ladite note signée du Directeur général de la Sodeco, Serges Aderomon, l’engrais Npk coton ou maïs ultérieurement vendu à 14 000 Fcfa le sac de 50kg est passé à 22500 Fcfa, soit une augmentation du prix initial de 8 500Fcfa. “Le prix unique de vente du NPK Coton ou maïs, dans toutes les boutiques est désormais fixé à vingt-deux mille cinq cent (22500) Fcfa le sac de 50Kg. Les ventes en détail de NPK sont autorisées dans la limite de quatre (04) sacs de 50Kg par client“ renseigne ladite note de service. Et pour s’en procurer plus de quatre sacs, il faudra saisir le Directeur général de la Sodeco en précisant l’objet de l’achat, la superficie de chaque spéculation emblavée au titre de la campagne 2024-2025, la location de l’exploitation etc.

Si officiellement, les autorités béninoises n’ont toujours pas évoqué l’impact de la hausse du prix de l’engrais NPK qui se révèle être celui, le plus adapté pour la culture du maïs, plusieurs sources paysannes s’accordent sur cette éventualité. Selon une source paysanne contactée, jusqu’en décembre 2023, l’engrais était encore accessible à 16 000Fcfa avant de passer définitivement à 22500Fcfa soit presque le double du prix initial.

Selon la même source, l’achat d’engrais aurait été réservée exclusivement aux cotonculteurs en l’occurrence les associations et coopératives. Toute chose qui ne facilitait pas l’accès des producteurs de maïs aux engrais malgré que le coût soit revu à la hausse. Il leur aurait été proposé un autre type d’engrais, autre que le NPK, adapté à la culture du maïs. “…Nous avons essayé mais le rendement n’est pas ce que çà devrait être“, confie la source.

Selon une autre source paysanne contactée par votre journal, l’accès auxdits engrais était facilité par des entreprises privées qui s’en procuraient au Nigéria pour les revendre aux paysans à un prix oscillant entre 12 et 14 000Fcfa. Mais cette activité serait interdite, faisant de la Sodeco, distributrice exclusive des engrais. Seulement qu’avec la Sodeco, les prix ont presque doublé mais surtout l’engrais NPK est resté difficilement accessible aux producteurs de maïs. “Tu te rends dans une boutique de la Sodeco, on te dit qu’il n’y a pas d’engrais or tu vois bien les sacs entreposés. Les engrais ont été réservés pour la culture du coton“ déplore ce paysan. Selon ses confidences, il leur a été proposé l’engrais FSP en remplacement du NPK, pourtant adapté à la culture du maïs. “Dans les boutiques de la Sodeco, on pouvait s’offrir des tonnes d’engrais NPK pour la culture du maïs mais depuis, ce n’est plus possible. Ce qui a fait baisser la production“ a-t-il renchéri.

Le gouvernent, en sa séance du Conseil des ministres du 20 avril 2022, avait pourtant pris des mesures de soutien à la production agricole, au nombre desquelles, le maintien du prix d’engrais pour la culture du coton et du maïs. “Depuis plusieurs campagnes agricoles, les prix des engrais livrés aux agriculteurs, aussi bien pour les vivriers que pour le coton, sont restés stables, soit 240 FCFA/kg et 12.000 FCFA le sac de 50 kg. Cette stratégie a eu pour impact de renforcer les performances de notre agriculture et de mobiliser les producteurs pour la cause. Mais, il s’observe actuellement une inflation des prix des matières premières ainsi que du fret maritime…ce qui a pour conséquence une hausse brusque et vertigineuse des prix d’acquisition des intrants agricoles notamment les engrais. Ceux-ci reviendraient à 22.500 FCFA le sac de 50 kg de NPK et 28.200 FCFA celui de l’urée, voire plus“ renseigne le compte rendu du Conseil des ministres.

Cela semble donc évident que la hausse du prix des engrais impacte inéluctablement le prix du maïs. Dans une publication, le média spécialisé en agriculture “Le Rural“ a d’ailleurs présenté la hausse du prix de l’engrais comme un fardeau pour les populations paysannes. Des témoignages recueillis par le média corroborent d’ailleurs cette réalité selon laquelle l’engrais devient de plus en plus inaccessible aux producteurs de maïs, en dehors du coût qui reste élevé. Il semblerait que l’engrais soit principalement destiné aux producteurs de coton, au détriment de ceux qui cultivent le maïs, argue le média. « Nous ne pouvons pas en trouver, car le gouvernement a déclaré que seuls ceux qui cultivent le coton ont droit à l’engrais. Cela a poussé de nombreux agriculteurs qui ne cultivent pas le coton à se tourner vers le Togo pour s’approvisionner en engrais », témoigne un paysan, dans des propos rapportés par le média.

Comment comprendre donc que jusqu’ici, les autorités béninoises n’en parlent pas alors que les populations continuent de se plaindre ? Si, au regard des faits, l’impératif reste de repenser la politique des intrants agricoles, la posture actuelle des autorités béninoises laisse toutefois perplexe.

Flambée du prix du maïs : comme si on s’y attendait !

Doit-on estimer que les autorités béninoises sont surprises par cette réalité de la hausse du prix du maïs ? Pour beaucoup, cela reste une conséquence d’une décision prise à un moment inopportun. En effet, dans le compte rendu du Conseil des ministres du 20 avril 2022, le gouvernement reconnaissait déjà qu’un tel niveau de prix élevé des engrais “compromettrait tout autant la compétitivité de notre agriculture que la disponibilité de produits agricoles en quantité suffisante“. « Une telle situation est de nature à provoquer un effondrement de la production agricole et menacerait gravement la sécurité alimentaire dans notre pays, si les dispositions adéquates ne sont pas prises » avait également reconnu le gouvernement béninois. Pour le Conseil des ministres, l’émulation des producteurs à utiliser et/ou à respecter les doses d’engrais se trouverait affectée, entraînant subséquemment une baisse du niveau de production nationale et partant, une hausse des prix des produits agricoles sur nos marchés voire une indisponibilité desdits produits. Toute chose qui avait amené le gouvernement à renoncer “temporairement au prélèvement par l’Etat, de la « contribution à la recherche agricole » ainsi que de la « redevance de promotion agricole » au titre de la campagne 2021-2022, le tout représentant un appui de 31,5 milliards de FCFA“. Ceci, pour maintenir le prix de cession des engrais toutes catégories confondues à 280 FCFA/kg soit 14.000 FCFA le sac de 50 kg. Tout semble laisser croire qu’on s’attendait bien à cette flambée du prix du maïs avec la décision de la Sodeco de porter à 22500Fcfa, le prix des engrais pour la culture du maïs.

La hausse du prix des engrais NPK ainsi que son accessibilité ne sauraient donc être occultées quant aux raisons de la hausse du prix du maïs. Vivement que le gouvernement revienne sur cette décision. En attendant, le maïs n’est plus à la portée de tous !

A.B

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