La modernisation de l’administration publique béninoise a permis la dématérialisation de plusieurs prestations désormais accessibles en ligne via des applications et plateformes. Alors qu’il est donc possible à tous les béninois d’accéder à ces services publics depuis leur smartphone ou android, les centres communaux des services publics ont été mis en place pour garantir l’accès à ces E-services aux populations notamment les plus démunies éprouvant toujours des difficultés souvent liées à un défaut de téléphone android ou encore d’accès à internet.

 

S’il suffit d’un téléphone android ou smartphone et une connexion internet pour accéder à plusieurs services publics au Bénin, qu’en est-il du sort des populations qui n’en disposent pas ou qui ne savent pas en faire usage ? Une préoccupation pertinente dans un contexte où tous les services se digitalisent. En effet, la mise en place des centres communaux des services publics (Ccsp) vient en réponse à cette préoccupation.

Il n’est donc plus question de se faire de souci pour accéder aux E-services peu importe si l’on dispose d’un smartphone et d’une connexion internet ou non. A en croire le Responsable du suivi des activités des Centres communaux de services publics, Pascal Yaha, lesdits centres ont été mis en place “pour rapprocher les administrés de l’administration“. Il s’agit, selon ses propos, des dispositifs mis en place pour permettre aux populations d’avoir accès à leurs actes et autres services publics sans être contraintes de se déplacer au-delà de leur commune de résidence.

“Ma tante avait besoin de se faire délivrer son Certificat d’identification personnelle (CIP) et devrait quitter Adjarra (38 km à l’Est de Cotonou) pour se rendre dans cette ville, capitale économique du Bénin. Elle n’avait pas de smartphone et ne savait même comment le manipuler. Quand elle m’a appelée, je lui ai demandé de se rendre à la mairie de la commune d’Adjarra et de se renseigner sur le centre communal de services publics. Elle m’a rappelée plus tard, sourire aux lèvres, pour m’informer qu’elle avait désormais son CIP (Certificat portant le numéro personnel d’identification)“ a confié Angèle Dossou, la quarantaine, vendeuse de poisson fumé à Agblangandan, banlieue située à l’Est de Cotonou. Elle témoigne avoir également orienté deux autres proches vers ledit centre dont elle n’a eu l’écho que par le biais d’un client. “Tout le monde n’a pas un téléphone android pour accéder facilement à ces services. Donc, c’est une bonne idée de mettre en place ces centres qui nous assistent“ s’est-elle réjouie.

Mis en place depuis décembre 2021 dans le cadre du Projet d’appui à la réforme et à la modernisation de l’Action publique (Parmap), par le gouvernement béninois, à travers le ministère du travail et de la fonction publique, avec l’appui du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), les centres communaux de services publics s’inscrivent dans la vision du gouvernement, celle de transformer le Bénin en une plateforme de services numériques de l’Afrique de l’Ouest, pour l’accélération de la croissance et l’inclusion sociale. Lesdits centres se veulent donc un dispositif facilitant, aux couches les plus démunies de la population qui ne disposent pas d’ordinateur ou de smartphone et de connexion internet, l’accès aux prestations digitalisées quelle que soit leur position géographique.

“ Ces centres de service en ligne…contribuent d’une part, au rapprochement des services publics de nos populations en général et des agents de l’État en particulier et d’autre part, à la lutte contre la corruption, autrefois favorisée par les contacts directs entre les agents et les usagers“ a déclaré la ministre du travail et de la fonction publique, Adidjatou Mathys, lors d’une récente séance d’échanges avec les points focaux desdits centres.

Quid du fonctionnement de ces centres…

Des explications du Responsable du suivi des activités des Centres communaux de services publics, Pascal Yaha, il ressort qu’un centre communal de service public est un dispositif composé d’un ensemble d’équipements que sont les bornes (Pupitre) tactiles utilisant un point d’accès Wi-Fi  et alimentées par l’énergie solaire photovoltaïque qui permettent aux usagers d’accéder en tout temps aux services dématérialisés. Le dispositif est également pourvu d’une caméra de surveillance pour assurer la sécurité des équipements, d’un écran de diffusion d’informations sur les prestations accessibles et les réformes en cours via le guichet puis d’une enseigne lumineuse pour orienter les usagers à leur arrivée sur les lieux d’implantation. Le centre est animé par un point focal, outillé pour mieux assister les usagers dans la manipulation des plateformes auxquelles ils veulent accéder via le système.

Yétongnon Wilfried Valéry est le Directeur des systèmes d’information de la mairie d’Allada et assistant du point focal du centre communal des services publics. A l’en croire, deux types d’usagers fréquentent le centre : il s’agit des usagers maîtrisant l’outil informatique et ceux qui ne s’y connaissent pas. “Pour ceux qui s’y connaissent en informatique, il y a un pupitre qui les dessert. Nous les orientons tout simplement. Par contre, le point focal se doit d’assister ceux qui ne maîtrisent pas l’outil informatique. Ceci, jusqu’à l’obtention voire l’impression de l’acte“ a-t-il expliqué. Et de laisser entendre que les usagers peuvent même accéder aux actes de carrière dans lesdits centres.

Déjà des statistiques rassurantes mais…

Faisant référence aux rapports mensuels de synthèse, la ministre du travail et de la fonction publique, Adidjatou Mathys estime que lesdits centres sont “très sollicités“ par les bénéficiaires dans leurs localités. Ainsi, il ressort que de janvier à fin octobre 2023, en moyenne six cent vingt-et-un (621) usagers fréquentent mensuellement les Centres communaux de services publics soit en moyenne 26 visiteurs par centre avec un taux moyen de satisfaction de plus de 75 %. En ce qui concerne les demandes non satisfaites, Pascal Yaha confie que généralement, il s’agit des services non encore disponibles en lignes. De même, 6367 préoccupations diverses ont été reçues traitées à 85% par les services compétents du ministère.

Si l’on peut bien se réjouir de l’impact des dispositifs mis en place, il faut noter que des difficultés persistent. D’abord, l’affluence reste la préoccupation majeure. Dans l’après-midi de ce mardi, 12 décembre 2023, un seul usager a été renseigné dans le registre du centre communal de Sèmè-Podji. A en croire le point focal, Pierre Djidonou, le centre est moins fréquenté. Mais en réalité, le centre semble plutôt ne pas être connu des populations. Chose curieuse, à l’accueil de la mairie de Sèmè-Podji, aucun des agents présents n’a pu nous orienter vers ledit centre. “Vous êtes sûr qu’il y a un tel centre ici ?“ nous a lancé un agent.

La réalité est similaire au centre communal d’Adjarra dans le département de l’Ouémé. Le meilleur taux mensuel de fréquentation réalisé est de 29 usagers seulement au mois de novembre 2023 et ceci, grâce à une démarche communicationnelle, confie Faraj Agnidé, point focal du Centre.  Selon lui, cette situation s’explique en partie par le fait que le service de l’Anip (Agence nationale d’identification des personnes) fournit les mêmes prestations au sein de la mairie. Ce qu’admet également le point focal du centre communal de Sèmè-Podji.

De son côté, Yétongnon Wilfried Valéry, assistant du point focal du centre communal d’Allada confie plutôt qu’il y a défaut de communication, de sensibilisation autour du centre. “Après notre passage sur la radio communautaire…le centre est désormais plus fréquenté. Sur une fréquentation de deux (02) usagers par mois, on est à plus de vingt-trois (23) mensuellement“ a-t-il déclaré.

L’autre difficulté reste la disponibilité et la fluidité de la connexion internet. Selon plusieurs points focaux, la connexion internet n’est pas stable et cela ne permet pas de mieux satisfaire les usagers. Une préoccupation à laquelle, la ministre du travail et de la fonction publique a promis trouver une solution durable, lors de la séance d’échanges avec les points focaux.

Quant au mécanisme de gestion des plaintes, il est recommandé aux points focaux de faire remonter systématiquement les demandes non satisfaites aux services compétents du ministère, précise Wilfried Valéry. De même, les boites à suggestions sont également mises à la disposition des usagers.

Notons que les centres communaux de services publics sont implantés dans vingt (20) communes à savoir Adjarra, Adjohoun, Allada, Aplahoué, Bassila, Bembéréké, Covè, Dassa-Zoumè, Djidja, Djougou, Kandi, Lokossa, Malanville, Nikki, Ouèssè, Ouidah, Péhunco, Pobè, Sèmè-Podji et Tanguiéta. Des réflexions se poursuivent, selon l’autorité ministérielle, quant à la généralisation de l’installation de ces dispositifs dans toutes les mairies.

Cet article a été rédigé par Aziz BADAROU dans le cadre de la Bourse de journalisme sur les IPN organisée par la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest et Co-Develop

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