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En attendant une décision de réouverture des parcs Pendjari et W: Col. Gomina : « Nous sommes prêts ! (…) la sécurité est là »

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En riposte aux attaques terroristes dans la partie septentrionale du Bénin notamment dans les zones frontalières avec le Niger et le Burkina-Faso, l’Etat-major des forces armées béninoises a pensé et mis en œuvre, depuis deux ans, l’opération Mirador. Selon les chiffres officiels avancés, environ 3000 soldats, appuyés matériellement aussi bien au sol que dans les airs, sont sur les théâtres pour empêcher toutes incursions de l’ennemi et sécuriser le territoire ainsi que les populations. Une descente sur différentes positions, en particulier dans les fuseaux Ouest et Nord de l’opération, nous a permis de tâter la réalité.  En attendant la série de publications découlant de cette immersion, nous vous proposons, en lever de rideau, cette interview réalisée dans le même cadre avec le Colonel Faïzou Gomina, commandant théâtre de l’opération Mirador. Il aborde globalement certains points sur lesquels nous allons revenir.

 

Pourquoi le nom Mirador donné à l’opération de lutte contre le terrorisme dans la partie septentrionale du pays ?

Dans les structures militaires, un mirador est une infrastructure sur laquelle il y a le militaire qui observe et qui est l’élément qui a la veille opérationnelle. Donc mirador est une opération qui a pour but de faire de la veille opérationnelle, de protéger les populations, et également d’empêcher toute infiltration ennemie sur notre territoire.

Si on doit brièvement évaluer, peut-on dire que l’Etat-major a vu juste en créant l’opération Mirador ?

Mirador c’est à partir du 1er janvier 2022, donc ça fait bientôt deux ans. Bien sûr que l’Etat-major a vu juste parce que la menace terroriste a commencé par prendre de l’ampleur sur notre territoire. Nous avons eu les premières attaques sur nos sols en décembre 2021, et là on s’est rendu compte qu’il fallait rapidement réagir, rapidement prendre le taureau par les cornes pour que nos populations soient protégées et que cette menace ne s’élargisse pas. Si vous prenez la carte au départ, vous allez constater que nos unités militaires étaient globalement à près de 200km des frontières. Le camp le plus éloigné au Nord était à Kandi, et l’autre c’était Natitingou. Mais aujourd’hui, parce qu’on a eu cette menace au niveau des frontières, nous sommes disposés tout le long de nos frontières.  Et je peux vous dire que la menace est domptée, la menace est sous contrôle. Mais il n’en demeure pas moins qu’il y ait de petites infiltrations qui sont rapidement réprimées.

Et le moral de la troupe ou de vos hommes sur le terrain, si vous devez l’évaluer ?

Il est très haut. Il est très haut parce que de plus en plus nous avons les moyens. De plus en plus le gouvernement met à notre disposition le matériel, les moyens qu’il faut pour mener cette lutte. Egalement, des infrastructures sont en train d’être construites. Vous avez vu des Bases opérationnelles avancées et des Points avancés fortifiés sur le terrain. Tout ça concourt à l’amélioration des conditions de travail de nos personnels et de la lutte contre la menace terroriste.

Au regard de ces indices, est-ce que tout concourt à la réouverture des parcs W et Pendjari aujourd’hui ?

Absolument ! Nous sommes prêts. Les parcs sont sécurisés. C’est une décision politique qui a fermé les parcs. Une décision politique viendra pour les ouvrir. Sinon, sur le plan sécuritaire, vous avez passé deux journées dans les parcs, je peux vous assurer que la sécurité est là.

 

Mirador, c’est trois fuseaux : Est, Nord et Ouest. Est-ce qu’on peut avoir la délimitation de chaque fuseau ?

Globalement le fuseau Ouest correspond au département de l’Atacora, le fuseau Nord celui de l’Alibori, et le fuseau Est celui du Borgou.

Il n’est pas exclu que l’ennemi fasse des recrutements au sein de la population. Justement, quelles sont les dispositions que vous prenez pour une bonne collaboration armée-population afin de lutter efficacement contre le terrorisme ?

Nous faisons beaucoup de sensibilisations avec la police et les autorités locales pour avertir la population. Mais également, lorsque nous avons des renseignements, nous faisons des actions offensives pour faire des arrestations que nous présentons à la justice pour que la suite du processus se fasse. Toutes ces actions visent à éviter qu’il y ait des implantations de cellules terroristes sur le sol béninois.

Quand on vous renseigne sur la présence de supposés terroristes, comment la sécurité de ceux qui vous renseignent au sein de la population est assurée ?

Le dispositif que nous avons mis en place nous permet de réagir à toute incursion. Il n’est pas exclu, et ça il faut qu’on se dise la vérité parce qu’on n’est pas partout et on ne peut pas être partout à la fois, qu’il y ait des actes pour lesquels nous sommes informés tard ou parce que les élongations sont longues, on ne puisse pas arriver à temps. C’est ça que je vous disais tantôt, toutes les incursions qui sont faites sur le territoire sont rapidement soit réprimées, ou arrêtées ou lorsqu’ils ont beaucoup de chances ils peuvent s’exfiltrer.

 

Un message à l’endroit de la population…

Le message que j’adresse à l’endroit de la population, c’est de coopérer avec les forces de défense et de sécurité, de dire toutes les fois qu’elles constatent des anomalies, qu’elles constatent des présences suspectes de rapidement se rapprocher des forces de défense et de sécurité pour que cette menace puisse être vite enrayée. Et aujourd’hui je puis vous rassurer que la population contribue énormément à la défense sécuritaire. Nous avons des populations qui parviennent même à identifier des IED (engins explosifs) qui sont placés. Je peux vous garantir que 50% des militaires ne sont pas en mesure des IED qui sont placés, de savoir qu’il y a un engin explosif qui est mis au sol. Mais nous avons des populations qui viennent nous alerter, comme quoi on a vu un endroit suspect ici ; on pense qu’il y a quelque chose, et quand on y va effectivement on se rend compte que c’est un engin explosif qui y est enterré.

A ce travail de sécurité que fait l’armée sur le terrain, ne faudrait-il pas une action du politique pour accompagner ou renforcer tout ça ? Surtout dans des zones comme Kourou /Koualou où l’Etat n’est pas pour autant présent…

La situation de Kourou est une situation particulière. Vous savez que Kourou Koualou était une région sous litige entre le Burkina Faso et le Bénin. En 2019, il y a eu un accord. Les accords de Pama qui font de cette zone une zone pratiquement neutre où on ne doit pas afficher des attributs de souveraineté : pas de drapeau du Burkina, pas le drapeau du Bénin. Donc quand les forces béninoises doivent aller là-bas, c’est de concert avec les autres ou après les avoir avertis, et vice versa. Et quand la situation que vous connaissez a commencé, à un moment donné le Burkina Faso n’avait plus de présence de personnels des forces de défense dans la zone. Nous, nous étions chez nous à Porga, mais eux ils n’étaient plus chez eux après Kourou Koualou. Donc Kourou Koualou est devenu un centre de trafic et un centre où les ennemis se réorganisaient et nous frappaient. Nos premières attaques sont venues de Kourou Koualou. Il y a eu une décision politique. Le chef de l’Etat du Bénin est allé voir son homologue du Burkina Faso pour lui présenter un concept des opérations pour que nous puissions sécuriser cette zone. Il y a eu un accord tacite. Nous, nous sommes présents, et depuis que nos troupes sont présentes à Kourou Koualou les attaques ont complètement baissé, la population est mieux sécurisée.

Dans le cadre de l’opération mirador, on a constaté que vous faites des actions civilo-militaires sur le terrain. Pourquoi cela ?

C’est systématiquement lié à nos opérations militaires. Les soins que nous portons aux blessés civils qui tombent sur les IED, vous êtes partis à Kourou Koualou, nous avons fait des forages qui servent à la population. Ça fait partie des actions civilo militaires. Aujourd’hui nous avons encore de grands projets qui sont en cours et qui vont être implémentés dans les prochains jours. Nous avons prévu par exemple aller à Kourou vacciner les bœufs pour les éleveurs. Ça c’est l’armée qui va le faire. Au niveau du gouvernement, il y a d’autres actions pour que les populations soient soutenues sur le plan infrastructurel et logistique.

Mais le rôle premier du militaire n’est pas cela. Pourquoi vous le faites alors ?

Ça fait partie de nos attributions. C’est des actions menées par les militaires mais au profit des civils. C’est pourquoi on parle d’actions civilo-militaires. L’objectif c’est aussi avoir plus de crédibilité, avoir l’acceptation de la population et ça permet également de rassurer cette dernière qui peut nous fournir des informations, des renseignements parce que obligatoirement ce que nous faisons c’est d’abord pour protéger les populations.

On peut donc dire que c’est pour permettre également une meilleure collaboration forces de défense et population ?

Absolument !

 

Propos recueillis par Jacques BOCO

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