Après plus de dix ans de fidélité et de défense des intérêts du pouvoir en place, les commis et défenseurs se sentent toujours marginalisés. Avec l’arrivée de nouvelles recrues de l’opposition au sein de cette mouvance et la survenance d’une trêve politique, le sort de ces commis communément appelés klébés qui sont vus comme boucliers de la Rupture risque d’être scellé.

Le Bénin s’achemine vers une période cruciale de son cycle démocratique avec les élections générales de 2026 en ligne de mire, incluant la présidentielle, les législatives et les communales. Ces échéances surviennent dans un contexte politique marqué par une reconfiguration des forces. Le principal parti d’opposition, Les Démocrates, se trouve dans une position délicate. Pour ces scrutins, cette formation a été confrontée à des obstacles majeurs ayant entravé sa participation effective aux joutes électorales, notamment le défaut de parrainages pour la présidentielle et l’invalidation de dossiers pour les législatives. Ces difficultés contribueront à une marginalisation de la principale voix d’opposition au sein des institutions élues. C’est dans cette atmosphère que s’est accélérée une vague de départs au sein du parti Les Démocrates. Plusieurs députés et responsables de cette formation ont officiellement annoncé leur démission pour rallier les blocs de la mouvance présidentielle. Ces ralliements ont eu une conséquence directe et majeure sur l’agenda législatif. En effet, c’est grâce à l’apport numérique de ces démissionnaires au Parlement que le processus de révision constitutionnelle a pu être mené à terme, permettant d’atteindre la majorité qualifiée nécessaire à l’adoption du texte. De nombreuses modifications, dont certaines substantielles, ont ainsi été apportées à la Loi fondamentale du pays. L’analyse de ces transferts politiques suggère qu’ils ne sont pas désintéressés. L’intégration de ces figures de l’opposition dans les rangs de la mouvance est perçue comme un échange de bons procédés, offrant en contrepartie des garanties politiques. Parmi ces garanties, la plus tangible semble être celle d’assurer leur réélection au Parlement, d’autant plus que l’une des modifications constitutionnelles adoptées prévoit désormais un mandat législatif de sept ans au lieu des quatre ans précédents. La démission de la députée Chantale Adjovi avait d’ailleurs été éloquente à cet égard, lorsqu’elle avait clairement indiqué son intention de revenir au Parlement, illustrant ainsi la quête de pérennisation de leur mandat politique.

Les nouvelles recrues et l’inquiétude des anciens klébés de la Rupture

Ces « ouvriers de la 25e heure », qui ont permis de débloquer et d’acter la révision constitutionnelle, sont désormais mis en lumière. Ces nouvelles recrues sont perçues comme des acteurs clés ayant permis à la mouvance et au président Patrice Talon d’atteindre des objectifs législatifs et politiques majeurs. Ce phénomène crée cependant un malaise palpable au sein des rangs historiques de la Rupture. Pendant ce temps, une frange de jeunes et d’anciens cadres qui ont défendu le pouvoir et le chef de l’État avec constance et engagement depuis les premières heures se retrouve potentiellement reléguée au second plan. Alors qu’ils ont été les soutiens indéfectibles du régime dans tous les contextes, ces nouveaux venus menacent ainsi de leur ravir la vedette et les positions stratégiques. La situation est d’autant plus source de tensions que certaines de ces nouvelles recrues ont, par le passé, été des adversaires politiques virulents du régime, allant même jusqu’à ester en justice contre certains des défenseurs du pouvoir. L’idée que ces anciens opposants puissent désormais dicter la conduite ou exercer une influence prépondérante au sein de la mouvance présidentielle génère des bruits et des interrogations légitimes quant à la reconnaissance et à la fidélité. Ces successions d’idées et de réalignements provoquent un grand remous au sein de la base politique et des cadres qui ont œuvré sans relâche pour le pouvoir en place.

L’Impact de la trêve politique

Le sort futur de ces fidèles de la première heure ou klébés devient incertain, d’autant plus que la nouvelle Constitution adoptée inclut une notion de trêve politique après les élections générales de 2026. Cette disposition, visant à apaiser le climat après les joutes électorales, risque paradoxalement de rendre moins utiles les services des fervents défenseurs du pouvoir. Dans un contexte de « trêve », où la confrontation politique partisane devrait théoriquement s’atténuer, le rôle de ces commis, souvent spécialisés dans la défense médiatique et le combat politique, pourrait diminuer. La question se pose donc de savoir quel sera désormais leur rôle et leur sort politique, face à l’arrivée de figures nouvellement ralliées et à la mise en place d’un nouveau cadre constitutionnel. La loyauté passée sera-t-elle récompensée par des postes ou des garanties, ou l’impératif de l’unité et du consensus politique favorisera-t-il les nouvelles alliances, laissant les anciens serviteurs dans l’expectative ? Ces questions restent posées.

J.G

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