Alors qu’il a empêché son parti d’être à la présidentielle et a entraîné d’autres démissions au profit de la mouvance, Michel Sodjinou reste muet quant à la suite de ses initiatives. Autant jeter le masque que de continuer à entretenir le flou
L’onde de choc a été déclenchée à la veille du dépôt de candidatures pour l’élection présidentielle du 12 avril 2026. Alors que le parti LD n’avait aucune difficulté à obtenir le nombre nécessaire de parrainages pour présenter son binôme de candidats, le député Michel Sodjinou a surpris tout le monde en refusant de soutenir le ticket de l’opposition. Cet acte a, de facto empêché les Démocrates de participer à cette course présidentielle, renforçant l’image d’un scrutin qui semblait être une simple formalité pour la mouvance présidentielle. Seulement, ce n’était pas seulement une défection, mais un coup stratégique porté au cœur du processus démocratique et à la diversité de l’offre électorale. La justification de ce geste politique blafard est arrivée rapidement, visant à apaiser les critiques. Par le biais d’une lettre ouverte et d’une vidéo, Michel Sodjinou a tenté de légitimer son action. Il a évoqué des dissensions internes au sein du parti et a accusé ouvertement le président du parti, l’ancien Chef d’État Boni Yayi, de nuire à l’ambiance et de favoriser des choix régionalistes pour le duo. Ce faisant, il a déplacé le débat d’une simple défaillance de parrainage à une crise de leadership et de ligne politique au sein de l’opposition. Cependant, cette tentative de justification a été largement perçue par l’opinion comme une diversion stratégique visant à dissimuler un accord politique plus profond. Les prétendues divisions internes, bien que réelles dans tout grand parti, ne peuvent pas justifier le choix d’un député de paralyser l’ensemble de son bloc politique à un moment aussi crucial qu’est la présidentielle. La prochaine étape fut la concrétisation de cette rupture. Le député a immédiatement démissionné du groupe parlementaire Les Démocrates à l’Assemblée Nationale, avant de quitter également sa formation politique. L’effet d’entraînement ne s’est pas fait attendre : dans les semaines qui ont suivi, d’autres députés du parti ont suivi son exemple, abandonnant l’opposition pour se diriger, de manière plus ou moins explicite, vers la majorité au pouvoir. Ces démissions en série, orchestrées peu après le verrouillage du scrutin présidentiel suivi de celui communal et municipal, mettent en lumière un schéma de déstabilisation coordonné de la principale force d’opposition, affaiblissant ainsi le contrôle parlementaire et le contre-pouvoir.
Et si Sodjinou jetait enfin les masques ?
Cette série d’actes dont le refus de parrainage, les justifications publiques et les démissions successives, dessine une trajectoire patente. Celle d’une dissidence organisée et, très probablement, orchestrée. Autrement, Michel Sodjinou n’a pas accompli tous ces actes pour se retirer dans l’inaction et observer de loin l’évolution de la scène politique. Son rôle crucial dans l’exclusion de l’opposition de la présidentielle fait de lui un acteur majeur des dynamiques post-électorales. Sa position est désormais celle d’un actif politique à négocier, et sa valeur réside précisément dans les services rendus à la mouvance. Si la plupart des autres élus dissidents se sont rapidement ralliés à la mouvance, Michel Sodjinou, quant à lui, semble vouloir maintenir un flou sur ses intentions finales. Il est vrai que la dissidence est un art qui nécessite parfois du temps pour être monnayée et peut être perçue comme une tentative d’optimiser les bénéfices personnels de son revirement. Toutefois, cette posture est en passe de devenir une ambiguïté politique. À la lumière des faits évoqués, la ligne est tracée. Le masque de l’opposant n’existe plus depuis le jour où son parrainage a été refusé. Les accusations contre son ancien parti, sa démission du groupe parlementaire, et l’exemple de ses collègues députés passés à la majorité, sont autant de preuves que le moment est venu pour Michel Sodjinou de rejoindre officiellement les rangs de la mouvance au pouvoir. Maintenir le mystère ne sert plus que ses intérêts personnels, au détriment de la clarté politique. Le ralliement semble inévitable, et le Bénin attend désormais l’officialisation d’une vérité que tout le monde connaît déjà. Cette officialisation marquera non seulement la fin d’une parenthèse, mais aussi un nouveau pas dans la reconfiguration d’un espace politique où la majorité tend à absorber les voix de l’opposition.



