Le commerce est depuis toujours le cœur battant de l’économie béninoise. Des allées animées du marché Dantokpa aux comptoirs frontaliers de Malanville, de Bohicon à Parakou, il fait vivre des millions de familles et structure la vie urbaine et rurale. Ce secteur, qui représente une part essentielle du PIB national, soutient massivement l’emploi informel et alimente les recettes de l’État. Pourtant, malgré son rôle vital, le commerce béninois reste marqué par une forte informalité, un manque de structuration et une vision stratégique encore fragmentée.

À l’heure où le Bénin cherche à diversifier son économie et à renforcer son intégration régionale, le commerce apparaît comme un levier central de transformation économique, sociale et territoriale. Les experts s’accordent : il ne s’agit plus seulement de redistribuer la richesse, mais de la créer.

Un secteur vital mais vulnérable

Aujourd’hui, la grande majorité des activités commerciales s’exercent dans l’informel. Boutiquiers, revendeuses de rue, détaillants et transporteurs constituent une force économique réelle, mais opèrent souvent en marge des cadres fiscaux et sociaux. Cette informalité leur offre une certaine flexibilité, mais elle les expose à de fortes précarités : absence de protection sociale, accès limité au crédit, faible reconnaissance légale. « Le commerce informel est une richesse cachée. Mais sans structuration, il reste une source d’instabilité économique », confie un économiste béninois.

Le commerce transfrontalier, notamment avec le Nigeria, illustre parfaitement cette dépendance. Les fermetures ponctuelles de frontières ou les crises diplomatiques entre les deux pays provoquent régulièrement des pertes considérables pour les commerçants béninois, révélant la fragilité d’un modèle trop tourné vers la revente et l’importation.

Formaliser sans fragiliser

Pour transformer durablement le commerce, la formalisation progressive du secteur informel s’impose comme une priorité. Mais, prévient-on, elle doit se faire par l’incitation, non par la contrainte.

L’État est appelé à créer un cadre attractif : immatriculation simplifiée, exonérations fiscales temporaires, accès au crédit, protection sociale adaptée et programmes de formation en gestion d’entreprise. La création de mutuelles et de coopératives commerciales pourrait également jouer un rôle clé dans cette transition vers la légalité économique.

Moderniser les marchés, investir dans le numérique

Les marchés béninois, souvent précaires et mal équipés, nécessitent une modernisation urgente. L’enjeu : améliorer les conditions de travail, renforcer la sécurité, intégrer des infrastructures sanitaires et repenser la planification urbaine.

Des projets ambitieux sont évoqués : rénovation des grands marchés, création de centres commerciaux communautaires modernes et décentralisation des plateformes logistiques vers les pôles régionaux.

En parallèle, le commerce numérique représente un nouveau front de croissance. Le e-commerce, encore embryonnaire, pourrait devenir un moteur d’inclusion économique. Formation, connectivité, régulation des plateformes et paiements électroniques sécurisés devront constituer le socle de cette révolution digitale.

Repenser les échanges intérieurs et extérieur

Sur le plan intérieur, la régulation des circuits de distribution, la lutte contre les monopoles et la protection du consommateur apparaissent comme des urgences. Promouvoir les produits locaux dans les marchés nationaux — via la certification, l’emballage et la logistique — renforcerait la souveraineté économique et la fierté du « Made in Bénin ».

À l’international, la balance commerciale déficitaire du pays appelle à une nouvelle stratégie. Simplification des procédures douanières, diplomatie économique active, infrastructures modernes et soutien aux exportateurs sont indispensables pour que le Bénin tire profit de la CEDEAO et de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf).

Une vision présidentielle pour transformer le commerce

Face à ces défis, le commerce s’impose désormais comme un enjeu politique majeur. Le futur président du Bénin devra faire du secteur un pilier de son projet de société, en l’articulant étroitement aux politiques agricoles, industrielles et fiscales.

Un engagement fort se dessine : « Si je suis élu Président de la République, je m’engage à moderniser 50 grands marchés sur l’ensemble du territoire, à formaliser 500 000 acteurs du commerce informel, à tripler la part du commerce électronique dans les échanges nationaux, et à faire du Bénin un leader régional du commerce de proximité et de l’exportation des produits locaux. »

Une promesse ambitieuse, à la hauteur des attentes d’un secteur qui ne demande qu’à se structurer pour prospérer et à se formaliser pour transformer durablement l’économie béninoise.

Thomas AZANMASSO

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