C’est désormais officiel : la Force Cauris pour un Bénin Émergent (Fcbe), jadis fer de lance du pouvoir sous le régime Yayi, passée dans une opposition « modérée » à l’ère de la Rupture sous le contrôle de Paul Hounkpè, a acté son ralliement à la mouvance présidentielle. Dans une mise en scène délibérément sobre mais lourde de symboles, la formation politique désormais dirigée par Paul Hounkpè a franchi le Rubicon, rejoignant une coalition dont elle ne s’était, en réalité, jamais vraiment éloignée.
Ce que certains médias ont présenté comme une surprise ou un « coup de théâtre » relève en réalité d’une évidence politique trop longtemps travestie. Le ralliement de la Force cauris pour un Bénin émergent est tout sauf un événement : il s’apparente davantage à la clôture d’une « comédie politique usée », jouée à huis clos entre initiés, au détriment de la lisibilité démocratique.
Un compagnonnage dissimulé, mais constant
Depuis les élections de 2020, la Fcbe version Paul Hounkpè a multiplié les signaux de connivence avec le pouvoir. Liste électorale validée par la Cour constitutionnelle malgré les controverses, absence d’opposition frontale lors des réformes controversées, soutien discret à certaines initiatives gouvernementales : les signes de complicité n’ont jamais cessé de transparaître.
Ceux qui espéraient une posture d’opposition responsable et autonome ont vite déchanté. La Fcbe, autrefois force de contre-pouvoir, s’est progressivement transformée en roue de secours pour la légitimation démocratique du régime Talon.
Ce ralliement formel n’est donc que la matérialisation d’une réalité déjà installée de facto. Il ne s’agit pas d’une réorientation politique, mais plutôt de la « normalisation d’une allégeance longtemps tue ».
Paul Hounkpè, chef d’orchestre d’un effacement progressif
À la tête de cette mutation silencieuse, Paul Hounkpè aura été l’artisan patient d’un glissement idéologique presque imperceptible pour les non-initiés. Par son style discret mais déterminé, il a su mener le parti vers une domestication politique, sans grands éclats, mais avec une efficacité redoutable.
De chef de file de l’opposition institutionnelle — une fonction largement symbolique —, Hounkpè devient désormais l’un des visages de la « majorité élargie », dans un casting déjà bien rempli de ralliés.
De l’illogisme politique sans fard
Ce retournement est à lire sous le prisme de « l’illogisme politique » : il illustre la priorité accordée par certains acteurs aux intérêts partisans ou personnels, au détriment de la cohérence idéologique ou de la parole donnée à l’électorat. Le peuple, encore une fois, observe à distance un ballet d’alliances où la fidélité aux convictions pèse moins que les promesses d’accès au pouvoir.
Cette recomposition met en lumière le vrai visage de la vie politique au Bénin, où la pluralité d’apparence dissimule une uniformité de fond. L’opposition réelle se retrouve davantage dans les mouvements citoyens et les partis authentiquement critiques du régime que dans les formations politiques de face au fonctionnement largement téléguidé.
Le ralliement de la Fcbe à la mouvance présidentielle n’est ni un choc, ni une rupture. C’est un épilogue attendu, celui d’un processus de désintégration politique maquillé sous les habits du pragmatisme.
Ce « retour à l’enclos » ne surprend que ceux qui ont refusé de voir que les cauris n’ont jamais quitté le champ du pouvoir. Il acte la disparition d’un pan de l’opposition historique, au profit d’une démocratie de façade où les lignes de démarcation s’effacent dès que le pouvoir tend la main.
M.M.