Vendredi 29 août 2025, l’Espace Culturel Le Centre a accueilli le vernissage de l’exposition collective des artistes Charly d’Almeida et Melinda Fourn-Houngbo. Dénommée « Et même les restes », cette exposition fait découvrir au public de nouvelles démarches artistiques, autres que celles reconnues à ces deux artistes visuels.

Après 3 semaines de résidence artistique, ponctuée par des ateliers Jeune public et des visites de terrain avec les enfants, les artistes Charly d’Almeida et Melinda Fourn-Houngbo exposent aux usagers de l’Espace Culturel Le Centre le fruit de leurs travaux. Vendredi 29 août 2025, les amoureux de l’art, qui ont fait nombreux le déplacement, n’ont pas boudé leur plaisir à la vue de leurs créations authentiques qui collent au thème de l’exposition collective, « Et même les restes ».  Les œuvres de Melinda Fourn-Houngbo sont une suite de l’atelier Jeune public en sculpture qu’elle a animé avec les enfants. On y découvre une rangée de perles faite de bambou, de graines de palmiste, de fil de pêche. Le tout formant un rideau de perles qui donne accès à neuf spatules recouvertes de fil de fer. La spatule, ancrée dans la culture béninoise pour son usage dans la préparation de la pâte, devient ici un objet de création artistique, tout comme des sachets d’eau recouverts de papier-journal, de colle et des tissus Wax de toutes couleurs. Aux dires de la franco-béninoise Melinda Fourn-Houngbo, le choix de ces spatules et de l’association du métal et du bois s’explique notamment par sa première visite du petit musée de la Récade de l’Espace Culturel Le Centre. « Ce qui m’a frappée, c’était finalement l’association du bois et du métal, qui sont deux matériaux totalement distincts, qui ont chacun leurs caractéristiques, et finalement le contraste qu’il y a entre eux », laisse-t-elle entendre. La perle de bambou est, pour Melinda Fourn-Houngbo, une manière de montrer qu’on peut récupérer des choses dans notre environnement, plutôt que de faire l’acquisition de matériaux qui sont beaucoup plus onéreux. « Le bambou, qui était vert lorsqu’on l’a percé, lorsqu’on l’a travaillé, et qui au fur et à mesure se durcit, change de couleur et a une résonance plus importante. Pour moi, c’est quand même une pièce qui est relativement olfactive, parce que si on s’approche, on peut sentir l’odeur des noix de palme » explique l’artiste. Quant aux sachets d’eau, l’artiste se remémore un souvenir d’enfance, lors de sa première visite au Bénin. « J’avais neuf ans lorsque j’étais venue au Bénin et ma grand-mère avait l’habitude de vendre des sachets d’eau. Et lorsque je suis venue, je ne savais pas exactement ce vers quoi je voulais tendre. Et la première chose qui m’a tenue à cœur, finalement, c’était de retravailler cette forme qui m’était familière. C’est tout un processus que les enfants ont pu voir. Le choix du tissu, c’était pour moi une manière de leur montrer qu’on pouvait colorer quelque chose sans forcément utiliser de la peinture » a-t-elle laissé entendre.

Charly d’Almeida donne une seconde vie à l’arête de poisson

En peinture, Charly d’Almeida a exposé plusieurs tableaux avec, en toile de fond, l’arête de poisson travaillée sous différentes formes et couleurs avec un rouge persistant. Sur ses tableaux, les arêtes ont la valeur de reliques, de fragments de vie qui, loin d’être effacés, se réorganisent pour composer un nouveau visage. Pour Charly d’Almeida, le travail consiste à aller rechercher les arêtes de poissons, ce qu’on peut appeler des squelettes, pour leur donner le sens de la résilience. « J’estime que l’os ne se dégrade pas, l’os a une certaine résistance, une certaine résilience dans son fonctionnement. Et c’est cet aspect qui m’a touché et qui m’a permis d’aller sur cette nouvelle démarche » laisse-t-il entendre. A ses dires, c’est l’idée d’aller vers un corps plus complexe, qui se dégrade facilement qui guide sa démarche. Parfois, il y a des poissons où le corps est entier, parfois à demi-corps dans un mouvement assez houleux. Selon Charly d’Almeida, on appelle ça la technique au couteau.

Quant aux couleurs, l’artiste affirme aimer le rouge, la couleur qui lui permet de se situer. « Le rouge, c’est comme une lampe qui me permet de me retrouver dans une ombre. Parce que quand je le mets, de loin, de partout, je le vois. J’ai aussi utilisé le vert. Aujourd’hui, je touche à toutes les variétés de couleurs, à tout ce qu’on appelle des teintes. Ça me permet de voyager, ça me permet de quitter mon monde et d’aller découvrir autre chose » explique-t-il.

Des appréciations

Directeur de l’Espace Culturel Le Centre, Berthold Hinkati se réjouit du grand intérêt des usagers pour la nouvelle démarche artistique des deux artistes. Pour lui, la franco-béninoise Melinda Fourn-Houngbo, par ses œuvres, a trouvé une manière urbaine de se reconnecter à son pays d’origine béninoise, en utilisant des matériaux comme la spatule, le bambou, les graines de palmiste, etc. pour véhiculer des messages. Quant à Charly d’Almeida, Berthold Hinkati affirme qu’on le connaissait beaucoup plus en sculpture, mais cette fois, il a choisi un nouveau médium à base de restes de poissons à des fins artistiques.

Ayant participé aux ateliers Jeune public, Zannou Grâce Blessing est heureuse d’avoir appris les couleurs primaires que sont le blanc, le noir, le rouge et le jaune, et comment les mélanger. « M. Charly nous a aidé à faire de jolis dessins. J’étais heureuse parce que j’ai dessiné et j’ai montré ça à mes parents qui étaient fiers de moi».

Directrice des arts visuels à l’Adac, Yassine Lassissi est fascinée par les œuvres des deux artistes. Pour elle, cette initiative de l’Espace Culturel Le Centre est très importante en ce qui concerne la transmission. « Qu’il vous souvienne lorsqu’on a organisé l’expo Art du Bénin d’hier et d’aujourd’hui à la Présidence, on avait un volet qui était dédié à la jeune création, aux jeunes artistes, pour la transmission. On faisait des ateliers initiés par des artistes qui se sont portés volontaires pour accompagner cette jeunesse dans la création et les initier à l’art.  Donc c’est fondamental et c’est salutaire. C’est salutaire à l’endroit de ces deux artistes qui partagent leur temps avec ces jeunes, puisque ces jeunes deviendront les grands de demain. Donc il faut les initier très tôt à la création artistique. Et donc moi je suis très sensible à cela. Et d’autre part, on a également cette transmission que l’on va retrouver entre un artiste majeur et une jeune qui est Melinda. Et donc on retrouve cette question de la transmission à tous les niveaux finalement » apprécie Yassine Lassissi.

Bertrand HOUANHO

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici