Ce mardi 29 juillet 2025, la salle de conférence du Bénin Royal Hôtel à Cotonou a connu des moments historiques pour les droits en santé sexuelle et reproductive en Afrique francophone. Devant un parterre de personnalités issues du gouvernement, d’institutions internationales, d’organisations féministes, de la société civile et de partenaires techniques et financiers, le Bénin a officiellement lancé l’initiative Kaléidoscope, un programme quinquennal (2025-2029) visant à garantir un accès universel, sécurisé et non discriminatoire à l’avortement.
Lancée sous l’impulsion d’un consortium transnational féministe, sous le thème « Construire la solidarité féminine pour la justice reproductive : l’approche fédératrice de Kaléidoscope », l’initiative Kaléidoscope regroupe des organisations telles que Women’s Global Network For Reproductive Rights (Wgnrr), Arrow, Mama Network et le Global Fund for Women, avec pour mission de transformer les systèmes de santé publique dans une approche inclusive, centrée sur les droits humains.
Au Bénin, la mise en œuvre est assurée par un consortium national composé de la Coalition des organisations de jeunes pour l’avortement sécurisé au Bénin (Cojas-Bénin) et du Collège national des gynécologues et obstétriciens du Bénin (Cngob), des acteurs engagés de longue date dans la défense des droits des femmes. L’initiative vise à renforcer le système de santé, à transformer les normes sociales et à influencer les politiques publiques afin de réduire significativement la mortalité maternelle liée aux avortements à risque.
Une cérémonie marquée par des engagements forts
Dans son mot d’ouverture, Régina Aho, socio-anthropologue et présidente de l’ONG Health and Development, représentant l’équipe organisatrice, a salué la diversité des parties prenantes réunies et a notamment exprimé sa reconnaissance au gouvernement du Bénin, aux différents partenaires ainsi qu’aux organisations de la société civile, affirmant que « la transformation passe par l’action collective et la solidarité ». Elle a présenté l’initiative Kaléidoscope au Bénin, et sa stratégie de mise en œuvre.
Parmi les temps forts, l’intervention de la pédagogue Dabaniana Choudhuri, Directrice exécutive du Wgnrr, représentante internationale du programme, a permis de situer le projet dans son contexte global. Elle a insisté sur l’importance de la justice reproductive comme levier de transformation sociale et de liberté individuelle : « Nous voulons un monde où chaque personne peut décider librement de sa vie, de son corps, de son avenir. », a-t-elle signifié. Représentant le Cngob, Dr Emmanuel Ewagnignon a procédé à la présentation de la théorie du changement de l’initiative.
Le gouvernement béninois, représenté par le Docteur Blaise Guézo Mèvo, a réaffirmé son engagement. Il a salué le rôle catalyseur de Kaléidoscope dans la mise en œuvre de la loi 2021-12 relative à la santé sexuelle et reproductive, déjà adoptée par le Bénin. Cette loi, saluée comme progressiste, autorise notamment l’avortement sous certaines conditions, un jalon crucial dans la lutte contre les avortements clandestins. « Le Bénin devient aujourd’hui le premier pays d’Afrique à accueillir officiellement cette initiative, grâce à un environnement politique favorable et une volonté affirmée de garantir les droits des femmes », a déclaré le représentant du ministère.
Une mobilisation durable
Au-delà de la cérémonie, Kaléidoscope entend impulser un changement structurel. Par la formation du personnel médical, l’amélioration de la qualité des soins, et le renforcement des campagnes communautaires, le programme veut ancrer durablement la justice reproductive au sein des politiques nationales. Il prévoit également un travail intense sur les normes sociales, encore imprégnées de tabous autour de la sexualité et de l’avortement.
Deux communications : « Partenariat technique et financier : aligner les collaborations sur les priorités nationales » et « Collaboration Sud-Sud ; solidarité féministe dans la construction des mouvements », ont permis de nourrir les débats.
Les prochaines étapes consisteront à déployer les actions sur le terrain dès 2025, avec des évaluations régulières jusqu’en 2029.
Thomas AZANMASSO