La gouvernance locale constitue le socle d’une structuration politique efficace au Bénin. Conformément au Code de l’administration territoriale, la commune est une collectivité territoriale décentralisée où s’exerce la démocratie à la base et où les citoyens participent activement à la gestion des affaires publiques. Placée sous l’autorité du département administré par un préfet, elle dispose d’une autonomie financière et juridique, lui permettant d’assurer librement son développement. Cependant, cette autonomie ne saurait être pleinement bénéfique sans une institutionnalisation rigoureuse d’une gouvernance participative et dynamique, où chaque commune joue un rôle central dans le processus décisionnel national.

Dans cette dynamique, l’implication des communes dans la vie politique doit être renforcée, afin de garantir une Assemblée Nationale véritablement représentative et une responsabilité accrue des maires. Un tel modèle permettrait d’ancrer les élections et les référendums au niveau local, assurant ainsi une implication directe des citoyens dans l’élaboration des décisions nationales. La décentralisation ne peut se limiter à une structure administrative : elle doit être un levier actif, où les communes influencent directement l’avenir du pays par leur gestion et leur vision stratégique. Pour cela, il est indispensable d’optimiser leur rôle, en leur conférant plus de responsabilités et une place prépondérante dans la structuration politique du Bénin.

I – État des lieux : Les dispositions actuelles

La gouvernance territoriale du Bénin repose sur le principe de la libre administration des collectivités territoriales, conformément à l’Article 2 du Code de l’administration territoriale. Ce texte établit également l’unicité de l’échelle de la décentralisation et de la déconcentration, garantissant une organisation administrative cohérente. Selon l’Article 3, le département constitue la circonscription administrative, tandis que la commune représente la collectivité territoriale décentralisée, incarnant la démocratie à la base. Le découpage territorial comprend douze (12) départements (Article 4), chacun étant administré par un préfet (Article 8), qui représente l’État et assure la coordination des ministères à l’échelle départementale.

De son côté, la commune dispose d’une autonomie financière et juridique (Article 24), lui permettant d’administrer librement son développement sous la direction du maire. Son fonctionnement repose sur le conseil communal (Article 60), principal organe délibérant chargé de définir les orientations stratégiques et politiques locales.

Cependant, certaines incohérences structurelles freinent l’efficacité de ce modèle. La restructuration électorale a instauré 24 circonscriptions, reléguant les 12 départements à un rôle secondaire et complexifiant la représentativité politique. De plus, la disparité des agences agricoles entre les départements crée un déséquilibre dans la mise en œuvre des politiques agricoles. Avec seulement 7 agences nationales pour 12 départements, il devient difficile de garantir un suivi efficace et une gestion cohérente du secteur. Ainsi, une réforme structurelle s’impose, visant à aligner les départements aux circonscriptions électorales, à renforcer la responsabilité des communes dans les élections et référendums, et à assurer leur pleine représentativité à l’Assemblée Nationale, le cœur de la démocratie.

II – Gouvernance inclusive : Ne laisser personne pour compte.

La gouvernance inclusive repose sur un principe fondamental : aucune voix ne doit être négligée dans le processus décisionnel. Pour garantir une démocratie équitable et dynamique, il est essentiel que toutes les couches sociales aient une implication consciente et engagée dans la structuration politique nationale. L’inclusivité permet non seulement de renforcer la légitimité des décisions, mais aussi de favoriser une cohésion sociale durable, en donnant à chaque citoyen le pouvoir d’agir pour le bien collectif.

2.1. La voix de chaque commune compte : La commune est la cellule de base de la gouvernance territoriale. Son implication effective permet de renforcer la participation citoyenne, d’adapter les politiques aux réalités locales et d’assurer une prise en compte des divers enjeux économiques, sociaux et culturels.

Avantages :

  • Représentation plus juste des réalités locales dans les politiques nationales.
  • Meilleure gestion des ressources grâce à un ancrage territorial des décisions.
  • Réduction des disparités entre les régions par un développement plus équilibré.
  • Responsabilisation accrue des élus locaux, garantissant une gestion plus transparente.

2.2. La voix de chaque catégorie sociale compte : L’équilibre politique et social passe par une représentation équitable des différentes catégories de citoyens. Hommes et femmes doivent être activement impliqués, car leurs expériences et perspectives enrichissent les prises de décision et assurent une gouvernance plus efficace.

Avantages :

  • Valorisation de la diversité des compétences et des sensibilités.
  • Réduction des inégalités et renforcement de la justice sociale.
  • Développement de politiques adaptées aux besoins de toutes les catégories sociales.
  • Stimulation de l’innovation par une meilleure diversité des idées et stratégies.

III – Une mairie efficace : Responsabiliser et opérationnaliser les communes.

La mairie est le moteur du développement local, garantissant l’exécution des politiques publiques et la coordination des services municipaux. Sous la supervision du préfet, elle doit assurer une gestion dynamique de sa commune, avec des leviers clairs pour la prise de décision et l’administration locale. Cependant, pour maximiser son efficacité, des dispositions nouvelles doivent être adoptées afin de clarifier les responsabilités du maire et de structurer une action municipale plus efficace.

3.1. Renforcement des pouvoirs du maire – Dispositions nouvelles à adopter :

  • Autonomie décisionnelle accrue dans la gestion des affaires locales, avec moins d’ingérence administrative.
  • Renforcement des prérogatives du maire en matière d’économie locale et d’aménagement du territoire.
  • Obligation de résultats avec des indicateurs précis pour évaluer la gestion municipale.
  • Coopération renforcée entre les communes pour une mutualisation des ressources et des initiatives.

3.2. Secteurs clés et responsabilités du maire

  1. Gouvernance et administration municipale
  • Pilotage de la gestion communale avec une équipe exécutive efficace.
  • Transparence budgétaire et gestion rigoureuse des finances locales.

b.Développement économique et emploi

  • Soutien aux initiative s locales et aux PME pour dynamiser l’économie.
  • Création d’un cadre favorable aux investissements dans la commune.

c.Urbanisme et infrastructures

  • Planification et suivi des projets d’aménagement urbain.
  • Gestion des infrastructures publiques : routes, bâtiments administratifs, espaces publics.

d.Agriculture et développement rural

  • Coordination avec les agences agricoles pour un développement adapté à chaque territoire.
  • Promotion de l’autosuffisance alimentaire et des filières agricoles locales.

e.Éducation, santé et services sociaux

  • Mise en place de politiques éducatives adaptées aux besoins locaux.
  • Développement des infrastructures sanitaires et sociales.

f.Sécurité et maintien de l’ordre

  • Mise en place d’un commissariat de la Police Républicaine pour garantir la sécurité et le respect des lois au sein de la commune.
  • Renforcement de la collaboration entre la mairie et les forces de sécurité, pour une présence efficace et une réponse rapide aux incidents.
  • Sensibilisation et prévention pour lutter contre la criminalité et les violences urbaines.

g.Protection civile et gestion des risques

  • Détachement de sapeurs-pompiers et d’éléments de la Garde Nationale pour assurer une réponse rapide aux urgences et catastrophes.
  • Plan communal de gestion des crises, incluant des dispositifs d’intervention en cas de catastrophes naturelles ou de sinistres.
  • Éducation et formation des citoyens sur les gestes de premiers secours et la prévention des risques.

3.3. Vers une mairie proactive et responsable

Pour garantir une mairie efficace, il est impératif que chaque commune dispose de moyens adaptés, d’une vision stratégique claire, et d’un cadre de suivi rigoureux. L’intégration d’une charte municipale des engagements et d’un dispositif d’évaluation des maires pourrait être un levier puissant pour responsabiliser ces élus et assurer une gestion dynamique et transparente.

IV – Système politique simplifié : Doctrine et mise en œuvre.

La simplification du système politique vise à organiser des élections transparentes, crédibles et apaisées, tout en minimisant les coûts et en garantissant une consultation régulière du peuple, par le biais des référendums et élections. Cette approche permettra une meilleure représentativité et une dynamique politique plus accessible à chaque citoyen.

4.1. Un cadre démocratique renforcé

  • Institutionnalisation du multipartisme intégral pour garantir la diversité des courants politiques et une compétition saine.
  • Modernisation du processus électoral par la généralisation de la biométrie digitale, assurant une identification fiable et permanente des électeurs dès la naissance.
  • Déploiement de kits biométriques et d’urnes à l’échelle communale, avec un personnel technique qualifié de la CENA assurant le recensement continu et la gestion des scrutins.

4.2. L’éducation politique au service de la démocratie

  • Alphabétisation généralisée pour permettre à chaque citoyen de participer efficacement aux débats et aux élections.
  • Renforcement des partis politiques avec une présence effective dans les 77 communes, garantissant un ancrage territorial solide et une meilleure représentativité.

4.3. Des élections transparentes et des institutions responsabilisées

  • Responsabilisation des élus locaux, avec la possibilité de traduire en justice et de démissionner un maire, un chef d’arrondissement ou de village en cas de défaillance électorale.
  • Les résultats provisoires annoncés par les maires, garantissant une transparence locale immédiate.
  • Clarification du rôle des représentants de la CENA, cantonnés à un rôle technique, tandis que les maires ont la responsabilité de publier les résultats.

4.4. Une Assemblée Nationale véritablement représentative

  • Révision de la représentativité nationale, en assurant la présence de deux députés par commune (un homme et une femme), pour un total de 154 députés garantissant une représentation équilibrée et territoriale.
  • Institutionnalisation d’un nombre minimal de députés pour permettre aux partis de bénéficier d’une subvention d’État, encourageant une restructuration progressive du paysage politique.
  • Consensus politique sur les conditions d’octroi des subventions, avec une validation par référendum ou conférence nationale.

4.5. Règlementation des candidatures présidentielles

  • Les partis subventionnés seuls habilités à présenter des candidats à la présidentielle, garantissant une structuration politique solide et organisée.
  • Intégration des candidatures indépendantes, avec une loi précisant le nombre minimal de signatures requises pour valider une candidature libre.

4.6. Un système électoral efficace et juridiquement encadré

  • Clarification du rôle de la CENA, chargée d’organiser les élections et de communiquer les résultats provisoires sur la base des chiffres fournis par les maires.
  • La Cour Constitutionnelle en charge des litiges électoraux et de la proclamation des résultats définitifs, garantissant une véritable sécurité juridique.

V – Décentralisation dynamique : Développons notre potentiel

La décentralisation est un levier puissant pour le développement communautaire, car elle permet une gestion locale plus adaptée aux réalités de chaque territoire. Elle offre aux communes une autonomie décisionnelle et une responsabilité accrue, ce qui favorise une politique de proximité, une optimisation des ressources locales et une implication directe des citoyens. Cependant, pour maximiser son impact, la décentralisation doit s’accompagner de structures adaptées, d’une vision claire des défis actuels et futurs, et d’une stratégie efficace pour réduire les inégalités régionales.

5.1. La population au cœur des programmes de développement : Une décentralisation efficace repose sur une implication active des citoyens dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques publiques. Les programmes de développement doivent être construits en adéquation avec les réalités locales, en tenant compte des besoins économiques, sociaux et culturels de chaque communauté. Voici quelques actions prioritaires:

  • Mise en place de mécanismes de consultation locale pour associer les citoyens aux décisions municipales.
  • Création de fonds de développement communal, permettant aux habitants de proposer et financer des projets adaptés aux besoins de leur territoire.
  • Formation et sensibilisation des citoyens sur les enjeux de la gouvernance locale, pour une participation éclairée et proactive.

5.2. Contenir les défis actuels et futurs : quelles structures sont nécessaires ? La décentralisation doit s’accompagner d’une réorganisation institutionnelle garantissant une coordination efficace entre les différents niveaux de gouvernance et une meilleure gestion des ressources. Structures nécessaires pourraient conerner:

  • L’institutionnalisation d’une agence nationale de suivi de la décentralisation, chargée d’évaluer les performances des communes et de définir des recommandations adaptées.
  • Le renforcement du rôle des préfets, pour assurer une meilleure coordination entre l’État et les collectivités territoriales.
  • La création de pôles régionaux de développement, regroupant les communes du même département autour de projets communs et stratégiques.
  • Harmonisation des financements locaux et nationaux, pour garantir une équité dans l’allocation des ressources.

5.3. Réduction des inégalités régionales : La décentralisation ne peut être efficace que si elle permet une redistribution équitable des ressources et une harmonisation des opportunités entre toutes les régions. Les solutions à envisager sont:

  • Allocation budgétaire spécifique aux communes défavorisées, pour corriger les disparités économiques.
  • Développement d’infrastructures stratégiques (routes, écoles, centres de santé), garantissant un accès équitable aux services essentiels.
  • Encouragement des investissements locaux, pour favoriser la création d’emplois et stabiliser les populations dans leurs territoires.
  • Politiques d’appui aux communes rurales, pour éviter une concentration des opportunités dans les grandes villes.

VI – Une décentralisation proactive et inclusive

Une décentralisation dynamique doit permettre aux communes de s’affirmer comme des moteurs du développement, en impliquant activement les citoyens, en consolidant les structures de gouvernance et en réduisant les disparités régionales. Fondée sur la responsabilité locale et la transparence, cette approche peut transformer durablement le paysage politique et économique du Bénin.

Dans cette dynamique, les maires occupent une place stratégique : ils doivent être les véritables architectes du progrès communal, en assumant pleinement leur rôle d’autorité locale. Véritables cadres de terrain, ils doivent diagnostiquer les défis, proposer des solutions durables, et impulser des initiatives innovantes pour répondre aux enjeux de la jeunesse et des femmes. Leur mission consiste également à mobiliser les acteurs locaux, à organiser les activités structurantes de la commune, et à harmoniser les fonctionnalités essentielles pour garantir un essor économique cohérent et inclusif.

Ainsi, en renforçant les responsabilités des maires, en leur donnant les outils et l’autonomie nécessaires, les communes pourront se positionner comme de véritables leviers de développement, contribuant efficacement à la prospérité nationale.

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