L’émigration clandestine en Afrique est un phénomène complexe et multidimensionnel qui résulte de divers facteurs interconnectés. Si certains Africains quittent leur pays pour des opportunités économiques ou éducatives, d’autres le font par nécessité, en raison de crises politiques, de conflits armés ou de conditions climatiques hostiles. Sur la base des informations tirées d’un rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (Hcr) ; d’une étude publiée dans la revue « Population et Avenir » et d’un autre rapport de l’Organisation internationale pour les migrations (Oim), cet article explore en détail les causes principales de la migration africaine.
En décembre 2024, le gouvernement béninois a organisé le rapatriement de 54 citoyens en situation de détresse en Guinée Équatoriale. Ces migrants, dont 29 femmes, avaient entrepris un voyage périlleux depuis le Nigéria, traversant le Gabon avant d’être secourus au large des côtes équato-guinéennes après une panne de carburant en mer. Un bébé est même né durant ce périple. Le 10 décembre 2024, un vol spécial affrété par le gouvernement a permis leur retour à Cotonou. Comme ces Béninois qui ont eu la chance d’avoir la vie sauve et marquer leur retour au bercail, bon nombre de jeunes africains s’illustrent dans ce voyage à haut risque vers l’Europe à la recherche d’un mieux-être. Nombreux sont ceux d’entre eux qui perdent la vie, en tentant de traverser l’océan. Ce phénomène qui dépouille l’Afrique de ses bras valides, mérite que l’on s’y penche.
L’émigration clandestine en Afrique : un phénomène multidimensionnel
La migration en Afrique est un phénomène complexe et multidimensionnel qui résulte d’une interaction entre divers facteurs économiques, climatiques et politiques. Ce continent, riche en diversité géographique et culturelle, est confronté à des défis multiples qui poussent des millions de personnes à quitter leur pays d’origine à la recherche de meilleures conditions de vie. D’un côté, les inégalités économiques croissantes, le manque d’opportunités d’emploi et la pauvreté poussent de nombreux Africains à migrer vers d’autres régions ou à l’étranger. D’un autre côté, les changements climatiques, tels que la désertification et les sécheresses récurrentes, aggravent les conditions de vie et accélèrent les déplacements forcés. Enfin, les instabilités politiques, les conflits armés et la mauvaise gouvernance créent un environnement propice à l’exode, obligeant les populations à fuir pour leur sécurité. Ainsi, comprendre les causes de la migration en Afrique nécessite une approche holistique prenant en compte l’ensemble de ces facteurs interconnectés.
Facteurs économiques : la recherche de mieux-Vivre
L’une des principales raisons qui poussent les Africains à migrer reste la recherche de meilleures conditions économiques. Les taux de chômage, notamment chez les jeunes, sont élevés dans de nombreux pays africains. L’industrialisation insuffisante, la faiblesse des secteurs privés et une économie informelle dominante ne suffisent pas à offrir des perspectives d’emploi stables.
Chômage et manque d’opportunités
Le marché de l’emploi africain est saturé. Les jeunes diplômés, souvent sans emploi, se tournent vers des migrations internes ou internationales dans l’espoir de trouver des opportunités plus prometteuses. De plus, la pauvreté et les bas salaires sont des facteurs de découragement. Les salaires qui peinent à satisfaire les besoins de base poussent les travailleurs à chercher ailleurs une meilleure rémunération, souvent en dehors du continent.
Inégalités et disparités régionales
Les grandes disparités entre les zones rurales et urbaines aggravent cette quête d’une vie meilleure. Les jeunes issus de zones rurales n’ont souvent pas accès à l’éducation et aux opportunités professionnelles qui existent dans les grandes villes. Cela les pousse soit à migrer à l’intérieur de leur pays, soit à chercher une vie meilleure dans des pays africains plus prospères, ou encore au-delà des frontières vers l’Europe.
Facteurs climatiques : l’exode écologique
Le changement climatique est une autre force majeure influençant la migration en Afrique. La dépendance de nombreuses économies africaines à l’agriculture et à l’élevage fait de ces secteurs les plus vulnérables aux aléas climatiques.
Désertification et sécheresse
Le Sahel, en particulier, fait face à des défis environnementaux majeurs, avec l’avancée inexorable du désert qui rend les terres agricoles de plus en plus infertiles. Les sécheresses récurrentes forcent les agriculteurs et les éleveurs à abandonner leurs terres. Ces conditions climatiques extrêmes contribuent à des déplacements internes et au-delà des frontières.
Montée des eaux et érosion côtière
Les pays côtiers, comme le Sénégal et le Bénin, subissent de plein fouet l’élévation du niveau de la mer et l’érosion des côtes, qui menacent les habitations des pêcheurs. Ces derniers sont contraints de se déplacer vers l’intérieur du pays ou à l’étranger, à la recherche de terres plus sûres.
Facteurs politiques et sécuritaires : instabilité et conflits
Les facteurs politiques jouent un rôle clé dans la migration forcée. Des conflits armés, des régimes autoritaires et des violences de grande ampleur poussent des millions de personnes à fuir leur pays.
Conflits armés et violences
Des régions comme la République Démocratique du Congo, le Mali, ou encore le Soudan, sont le théâtre de conflits armés violents, obligeant des populations entières à fuir. Ces conflits créent des vagues de réfugiés qui se déplacent à la fois à l’intérieur des frontières et vers des pays voisins, créant ainsi de nouvelles crises humanitaires.
Insécurité et terrorisme
Le terrorisme, avec des groupes comme Boko Haram ou Al-Shabaab, aggrave les conditions de vie dans plusieurs pays d’Afrique. Les attaques incessantes des groupes djihadistes poussent les populations à fuir pour leur survie.
Instabilité politique et répression
Les régimes autoritaires, les coups d’État fréquents et la répression des opposants politiques conduisent à des vagues de migration vers des pays plus stables. Les intellectuels, les journalistes et les activistes sont souvent contraints de s’exiler, craignant pour leur vie.
Facteurs démographiques et sociaux : pression démographique et réseaux migratoires
L’explosion démographique en Afrique est également un facteur contribuant à la migration. Les fortes croissances démographiques augmentent la pression sur les infrastructures publiques, telles que les écoles, les hôpitaux et les logements. Face à cette situation, de nombreux jeunes préfèrent partir à la recherche de meilleures conditions de vie ailleurs.
De plus, les réseaux migratoires jouent un rôle central dans l’acheminement des migrants. La diaspora africaine envoie des fonds à ses proches restés au pays, facilitant ainsi le financement de nouveaux départs. Ces réseaux offrent également un soutien logistique (hébergement, emploi, conseils) aux nouveaux migrants, ce qui contribue à l’extension de ce phénomène.
Un enchevêtrement de facteurs complexes
La migration en Afrique est un phénomène complexe qui ne peut être réduit à un simple exode vers l’Europe. Si la quête d’une vie meilleure, l’instabilité politique et les conditions climatiques extrêmes sont des moteurs importants, il est crucial de considérer cette réalité sous un prisme global. Les migrations intra-africaines, souvent sous-estimées, sont également un aspect majeur du phénomène. Une approche plus inclusive et des solutions durables, telles que des investissements dans l’économie locale, une gouvernance renforcée et des politiques d’adaptation aux changements climatiques, pourraient offrir des alternatives et réduire la pression migratoire.
Thomas AZANMASSO