Une autre loi à polémique, diront certains tandis que d’autres y voient une réforme majeure mal pensée de plus. Adoptée par l’Assemblée nationale le jeudi, 13 mars 2025, la loi N° 2025-09 portant cadre juridique de la chefferie traditionnelle en République du Bénin fait l’objet de critiques acerbes. Des réactions qui fusent de toutes parts, il apparait quasi-inconcevable qu’une loi de haute portée historique comme celle-ci soit adoptée avec tant de marge laissée aux contestations. S’agit-il de l’effet d’une éventuelle précipitation ou le résultat d’une quête effrénée de bilan flatteur en fin de mandat de la Rupture ?

Des contestations sur la toile et des audiences de têtes couronnées qui n’en finissent plus au Palais des gouverneurs, il est plus qu’évident que la nouvelle loi sur la chefferie traditionnelle se trouve encore loin d’être perçue tel un nouvel exploit à l’actif du régime de la Rupture, comme aiment bien s’en vanter les klébés. Si cela se révèle invraisemblable qu’une loi, à peine adoptée, suscite autant d’indignations, il importe de s’interroger sur ce qui a pu empêcher que l’on accorde autant d’attention à une loi d’une telle portée. Dans un pays dont l’histoire reste dominée par celle des royautés, l’on ne peut comprendre qu’une telle loi soit adoptée sans la prise en compte de tous les aspects possibles y afférents y compris les plus moindres possibles. Certes, une loi suscitant de la polémique n’est plus un fait nouveau sous la Rupture mais une loi portant organisation et fonctionnement des chefferies traditionnelles ne devrait susciter autant d’indignation dans l’opinion. Et ceci, au regard de l’histoire du Bénin, telle que contée et telle qu’elle se vit encore. Comment as-t-on pu adopter une telle loi sans y consacrer tellement de temps afin d’éviter toute frustration ? A-t-on vraiment pris la peine de consulter toutes les voix qui méritaient d’être entendues ? S’est-on réellement inspiré des histoires derrière chaque royaume pour décider du contenu de ladite loi ? Autant d’interrogations que suscite l’adoption de ladite loi.

A la sortie d’une audience avec le Président de l’Assemblée nationale, Parfait Oloufade, conseiller communal à Ifangni et porte-parole de la délégation du roi affirmait déjà que : “Lors des enquêtes menées, notre communauté n’a malheureusement pas été consultée“. Selon certains observateurs, il est à déplorer une certaine précipitation autour de l’adoption de cette loi qui, visiblement, nécessite davantage de réflexions. Si cette thèse se révèle avérée, il importe tout de même de s’interroger sur ce qui presse. Est-on pressé de se targuer d’une autre réforme majeure avant la fin de mandat ? La question reste toute posée et bien malin qui pourra répondre. Le chantre de la Rupture rêvant toujours d’être porté en triomphe à la fin de son mandat ne pouvait que s’enorgueillir de toute façon car il s’agit bien d’une réforme majeure, celle de l’organisation des chefferies traditionnelles. Seulement, tous les ingrédients ne se retrouvent pas réunis et la console semble encore loin de refléter l’équilibre recherché. L’exploit ne peut donc qu’attendre espérant que le tir soit corrigé en vue de garantir ce bilan flatteur à la Rupture. En attendant, la vague des contestations se poursuit.

 Indignation et contestation…

Si entre autres rois de Takon, d’Itasumba ou encore la délégation de la Cour royale d’Ifangni ont jugé nécessaire de se porter vers le Président de l’Assemblée nationale pour exprimer leur indignation suite à l’adoption de la loi sur la chefferie traditionnelle, beaucoup ont préféré recourir à d’autres canaux pour se faire entendre. Tel est le cas des Xwéda du royaume de Saxè qui dénoncent une exclusion à travers ladite loi, perçue “comme une tentative d’effacement, dans la mémoire collective, de faits historiques avérés“. Alors que Takon revendique son statut de royaume au regard de son histoire avec une lignée qui remonterait jusqu’à Oyo, au Nigeria, Itasumba plaide pour la reconnaissance de son histoire. Même à Abomey, ça murmure contre la nouvelle loi, selon les indiscrétions. Doit-on opter pour la relecture de la loi sur la chefferie traditionnelle alors qu’elle vient à peine d’être adoptée ? Les jours à venir nous édifieront.

Quid de la loi sur la chefferie traditionnelle…

Adoptée par les députés de la 9ème législature, la loi N° 2025-09 portant cadre juridique de la chefferie traditionnelle en République du Bénin vise à définir un cadre juridique pour le pouvoir des autorités de la chefferie traditionnelle ; conférer une reconnaissance légale aux chefferies traditionnelles existant sur le territoire béninois, fixant les règles garantissant leur organisation et leur rôle dans le développement socioéconomique du pays ; reconnaitre leur contribution à la cohésion sociale et à la préservation des identités culturelles. Il s’agit d’une réforme voulue par le gouvernement et qui prend en compte les spécificités des chefferies coutumières de type clanique notamment dans les régions de l’Atacora-Ouest et de la Donga. Ainsi, la présente reconnait entre autres 16 Royaumes, 80 chefferies supérieures, 10 chefferies coutumières.

A.B

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