(Cela peut-il se passer dans une mairie aux mains de l’Opposition ?)

Pour ses écrits critiques à l’égard du gouvernement dans le forum WhatsApp des conseillers communaux d’Abomey-Calavi, le Chef d’arrondissement (Ca) de Glo-Djigbé, Gilbert Sètondji Bocco, est suspendu. Le maire Angelo Ahouandjinou, après lui avoir adressé une demande d’explication, a fait convoquer une session extraordinaire, mardi 4 mars 2025, ayant pour ordre du jour l’examen de la réponse à la demande d’explication adressée au Ca de Glo-Djigbé. C’est donc suite à cette séance qu’on apprend que le Chef d’arrondissement de Glo-Djigbé a été suspendu. Pire, il court le risque d’être révoqué. Ainsi, ce qui semblait surréaliste pour beaucoup de Béninois est pris au sérieux par le maire Angelo Ahouandjinou qui trouve des arguments de droit pour justifier l’acte. Dans l’argumentaire ayant soutenu la décision de suspension, il est évoqué les articles 119, 183 et 184 du Code de l’administration territoriale.

Que disent ces articles ?

PARAGRAPHE 4 REGIME DE RESPONSABILITE DU MAIRE ET DES ADJOINTS AU MAIRE

Article 119 : Constitue une faute lourde : – toute faute réprimée par la loi pénale et constitutive d’une atteinte à l’honneur ou à la probité; – toute violation des règles de déontologie administrative : représentant un manquement grave au devoir ou un abus de pouvoir ou qui induit un dysfonctionnement grave dans l’exécution ou le fonctionnement du service public ; qui porte gravement atteinte aux intérêts de la commune.

PARAGRAPHE 3 REGIME DE RESPONSABILITE DU CHET D’ARRONDISSEMENT

Article 183: En matière administrative, le chef d’arrondissement qui commet une faute lourde peut être révoqué de ses fonctions. Constituent une faute lourde du chef d’arrondissement, les faits indiqués à I’article 119 de la présente loi.

Article 184: La faute lourde est constatée par le maire qui, après avis du conseil communal, peut prononcer, par arrêté, la suspension du chef d’arrondissement, après l’avoir mis en mesure de faire valoir ses moyens de défense soit par écrit, soit devant le conseil communal. Il en dresse un rapport au Préfet dans les huit (08) jours qui suivent la constatation de la faute. La durée de la suspension du chef d’arrondissement ne peut excéder soixante (60) jours. Passé ce délai, le chef d’arrondissement suspendu est de plein droit rétabli dons ses fonctions.

Il ressort de l’analyse de ces articles que pour mériter une suspension, le Ca de Glo-Djigbé aurait été coupable d’une faute grave. Dès lors, on peut se demander en quoi critiquer le gouvernement dans un forum WhatsApp fermé, puisque dédié uniquement aux conseillers communaux d’Abomey-Calavi, serait une faute grave. 1- Ce n’est pas une violation de la loi pénale. 2- Si la critique de Gilbert Sètondji Bocco constitue une violation des règles de déontologie administrative, il faudra ensuite prouver que cela représente un manquement grave au devoir ou un abus de pouvoir, ou que cela induit un dysfonctionnement grave dans l’exécution ou le fonctionnement du service public ; ou encore que cela porte gravement atteinte aux intérêts de la commune. En quoi une critique de l’action gouvernementale peut être tout cela ?

Des lois instrumentalisées à des fins politiciennes ?

Dans les communes du Bénin, les maires et adjoints aux maires proviennent des partis politiques. Ce sont des élus. Ils peuvent être de l’Opposition ou de la Mouvance. Supposons que le maire d’Abomey-Calavi et ses adjoints sont des élus de l’Opposition. Le maire va-t-il, dans ce cas, évoquer les articles du code de l’administration territoriale pour suspendre un Ca qui aurait critiqué le Gouvernement ? Le rôle dans lequel s’illustre le maire de la commune d’Abomey-Calavi n’est-il pas celui du parti politique auquel appartient Gilbert Sètondji Bocco, en l’occurrence l’Up-R ? Ne revient-il pas au parti de blâmer le Ca qui aurait tenu des propos qui vont à l’encontre de la ligne du parti ? Est-ce que dans la partie septentrionale où certaines communes sont contrôlées par le parti d’opposition Fcbe, un maire Fcbe peut suspendre un Ca Fcbe pour avoir été critique à l’encontre du Gouvernement ? On a l’impression que ce n’est pas tant la critique, considérée comme faute lourde, un manquement au code de l’administration territoriale le problème. Il est peut-être ailleurs. Et comme qui veut noyer son chien l’accuse de rage, il est possible qu’après le délai de 60 jours de suspension, le Préfet, à qui un rapport doit être fait, peut décider de la révocation du Ca de Glo-Djigbé, après avoir, selon le code de l’administration territoriale, réuni le conseil départemental de coordination et de concertation. Tout ça pour une critique…

M.M

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