(Zoom sur les différents types de violences basées sur le genre)
Alors que depuis des années, des efforts sont consentis par les gouvernants béninois et les organisations de la société civile, le nombre de victimes des violences basées sur le genre reste non négligeable. Des statistiques renseignées par l’Observatoire de la femme, de la famille et de l’enfant (Offe) à travers son Système intégré des données relatives à la famille, la femme et l’enfant-Nouvelle Génération (Sidoffe-NG), restent inquiétantes et interpellent…
Si la notion de violence basée sur le genre renvoie à tout type d’acte préjudiciable perpétré contre une personne ou un groupe de personnes en raison de leur sexe, de leur genre, de leur orientation sexuelle, mais également de leur identité de genre, réels ou perçus, au Bénin, les femmes en sont majoritairement victimes. Selon les données du Système intégré des données relatives à la famille, la femme et l’enfant-Nouvelle Génération (Sidoffe-NG), de janvier 2020 à septembre 2023, 94001 cas de violences basées sur le genre ont été recensés et pris en charge et 86,17% des victimes sont des femmes et filles.
Il se révèle donc que le nombre de victimes des violences basées sur le genre reste davantage inquiétant ces dernières années au Bénin. Et ceci, malgré l’arsenal juridique dont s’est doté le pays pour prévenir et réprimer le fléau. De la loi n°2011-26 du 9 janvier 2012 sur la prévention et l’interdiction de la violence contre les femmes, couvrant la violence domestique et le viol conjugal, le harcèlement sexuel, la prostitution forcée, le mariage forcé, les crimes d’honneur, les mutilations génitales féminines et autres pratiques néfastes à la loi N°2021 – 11 du 20 décembre 2021 portant dispositions spéciales de répression des infractions commises à raison du sexe des personnes et de protection de la femme, le cadre légal semble bien approprié pour une éradication des Violences basées sur le genre au Bénin. Seulement, les données statistiques laissent encore perplexes.
Des statistiques inquiétantes…
De 2020 à 2023, 58 469 cas relatifs aux violences basées sur le genre ont été recensés avec en 2020, 13 465 cas recensés ; 12 120 en 2021 ; 16 261 en 2022 ; 16 623 en 2023 et 19421 à fin octobre 2024, selon l’Observatoire de la femme, de la famille et de l’enfant (Offe) à travers son Système intégré des données relatives à la famille, la femme et l’enfant-Nouvelle Génération (Sidoffe-NG).
De même, sur la période de 2020 à 2024, 3372 cas ont été recensés dans l’Alibori ; 3142 dans l’Atacora ; 6078 dans l’Atlantique ; 6392 dans le Borgou ; 5035 dans les Collines ; 4149 dans le Couffo ; 2393 dans la Donga ; 1504 dans le Littoral ; 4475 dans le Mono ; 7018 dans l’Ouémé ; 5289 dans le Plateau et 9590 dans le département du Zou. Les VBG touchent majoritairement les personnes de 18-59 ans (69,83%) et de 15-17 ans (18,73%).
Et des données départementales renseignées par l’Offe, les départements du Zou (14,88%), de l’Atlantique (10,49%), des Collines (9,80%), de l’Ouémé (8,50%) et du Couffo (7,77%), représentent à eux seuls 58,09% des cas de VBG reçus et pris en charge en République du Bénin au cours de la période de 2020 à 2023. Par ailleurs, les communes de Parakou, Cotonou, Djougou, Abomey, Bohicon, So-Ava, Dassa, Covè, et Ouèssè, citées dans les 6 premiers ordres du classement national, totalisent 251.000 cas de VBG.
Quid des types de VBG
Plusieurs types de violences basées sur le genre sont renseignés au Bénin. Il s’agit entre autres des violences physiques, économiques, psychologiques, sexuelles, patrimoniales.
Les violences physiques restent les violences faites aux femmes les plus connues au Bénin quand bien même elles ne constituent pas la forme majeure de manifestation des violences basées sur le genre. Se définissant comme étant tout type d’acte entrainant un dommage non accidentel moyennant le recours à la force physique ou à tout type d’arme ou d’objets pouvant provoquer ou non des lésions internes, externes ou les deux à la fois, les violences physiques. Et des 94001 cas de violences basées sur le genre enregistrés de de janvier 2020 à septembre 2023, les violences physiques représentent 15,17%. Et en 2023, 4312 cas de violences physiques ont été recensés sur des victimes de plus de 18 ans. De janvier à juin 2024, 242 cas ont été recensés sur des victimes de moins de 18 ans et 3070 cas de violences physiques sur des victimes de plus de 18 ans.
Les violences psychologiques…
Elle est présentée comme étant la forme majeure de manifestation des violences basées sur le genre au Bénin mais elles ne sont pas toujours perceptibles. Selon l’Observatoire de la famille, de la femme et de l’enfant (Offe), les violences psychologiques se définissent comme étant le fait de soumettre toute personne à des agissements ou paroles répétées ayant pour objet ou pour effet, une dégradation des conditions de vie susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité […]. “C’est aussi un acte ou une négligence portant préjudice à la stabilité psychique, un abandon, une inattention réitérée, une jalousie excessive, des insultes et humiliations, une dévalorisation, une marginalisation, un manque d’affection, des comparaisons destructives […], autant de situations pouvant amener la victime à sombrer dans la dépression, à s’isoler, à perdre l’estime de soi, voire se suicider“ clarifie Dr. Nassirou Kassoumou Hararou, Directeur de l’Observatoire.
Des 94001 cas de violences basées sur le genre enregistrés de de janvier 2020 à septembre 2023, les violences psychologiques représentent 47,06 % de cas recensés (44235 cas). Et seulement en 2023, 11 425 cas (plus de 18 ans) de violences psychologiques ont été recensés avec plus de 1000 cas dans chacun des départements de l’Atlantique, du Mono et de l’Ouémé. Et du 1er janvier au 30 juin 2024, 4253 cas (plus de 18 ans) ont été enregistrés et 874 cas de moins de 18 ans. Faisant une analyse des données statistiques, Dr. Nassirou Kassoumou Hararou déplore une hausse des cas de violences psychologiques pris en charge.
Violences économiques
Les violences économiques se définissent comme étant « le fait d’user de ses moyens pour ralentir ou empêcher l’épanouissement économique ou financier de toute personne, ou le fait d’empêcher toute personne de jouir de ses droits socio-économiques ». Ces violences se manifestent de plusieurs manières et peuvent se traduire par l’interdiction à la victime de mener une activité économique de son choix ; le refus de donner la popote et le prélèvement de moyens dans la réserve de la victime.
Elles font partie des violences, les plus récurrentes, faites aux femmes. L’une des trois formes majeures de manifestation des VBG, les violences économiques représentent 12% des 94001 des cas de violences basées sur le genre recensés entre 2020 et 2023. Rien qu’en 2023, 2962 cas de violences économiques ont été enregistrés sur des victimes de plus de 18 ans et 463 cas sur des victimes de moins de 18 ans. Et de janvier à juin 2024, 1234 cas de violences économiques ont été recensés.
Violences sexuelles
Elles se définissent comme tout acte ayant pour effet de dégrader ou d’entrainer un dommage pour le corps et/ou la sexualité de la victime et qui, par conséquent, porte atteinte à sa liberté, à sa dignité et à son intégrité physique. Selon une communication du Directeur de l’Offe, il s’agit de tout acte sexuel commis, des abus sexuels, des tentatives d’abus sexuels, des attouchements, des allusions sexuellement explicites, de l’exploitation sexuelle, du viol, du harcèlement sexuel, des mutilations génitales féminines, des mariages forcés/précoces, etc. Elles sont également toute tentative d’initier un acte sexuel, en usant de la coercition, de la force, de la menace ou de la surprise.
De janvier à juin 2024, 187 cas de violences sexuelles ont été enregistrés alors 1211 cas ont été recensés en 2023 uniquement.
Violences patrimoniales
Les violences patrimoniales se définissent comme tout acte ou négligence affectant la survie de la victime et consistant à transformer, soustraire, détruire, retenir ou détourner des objets, documents personnels, biens et valeurs, droits patrimoniaux ou ressources économiques, destinées à couvrir ses besoins et pouvant s’étendre aux dommages causés aux biens communs ou propres à la victime. De janvier à juin 2024, 38 cas ont été signalés sur des victimes de moins de 18 ans
Aziz BADAROU (Avec l’appui de Ceradis-Ong, membre l’Alliance Droits et Santé)