La condamnation à 20 ans de prison de deux personnalités de la mouvance du président Patrice Talon pour tentative de coup d’État, notamment Olivier Boko, ancien bras droit du chef de l’État, et l’ancien ministre Oswald Homeky continue de susciter des réactions. Le philosophe politique et Directeur de l’Institut des Artisans de Justice et de Paix (IAJP-Co), le Père Arnaud Éric Aguénounon, s’est lui aussi prononcé sur l’affaire dans une interview accordée à l’hebdomadaire catholique La Croix du Bénin. Il n’a pas manqué d’aborder des questions liées à la situation sociopolitique du Bénin.
Les tensions politiques que suscite l’affaire de la condamnation à 20 ans de prison pour tentative de coup d’Etat à l’approche des élections générales de 2026 n’a pas laissé indifférent le Père Arnaud Éric Aguénounon. Abordant la question, le philosophe appelle à une introspection des détenteurs du pouvoir. Le Directeur de l’Institut des Artisans de Justice et de Paix estime que la crise actuelle est avant tout une crise de personnalités, marquée par des excès et une vision trop centrée sur les intérêts individuels des dirigeants. « Un pouvoir qui se condamne lui-même est un pouvoir en crise », a-t-il déclaré. Invitant les autorités à amorcer une décrispation politique pour éviter une aggravation des divisions, le Père Aguénounon appelle dans son intervention à une gouvernance basée sur l’écoute et le dialogue, impératif selon ses propos pour surmonter les défis actuels et construire une démocratie véritablement inclusive.
Une crise du pouvoir
Le Père Aguénounon en conclut à une crise de pouvoir, car pour lui, le pouvoir ne doit pas être réduit à une simple force ou à un outil de contrôle, mais doit être envisagé comme un espace de décision visant à améliorer la vie des citoyens et à bâtir une nation durable. Il déplore que, dans de nombreux pays africains, y compris le Bénin, le pouvoir soit souvent exercé de manière autoritaire, engendrant peur et silence au sein de la population. « Quand un peuple se tait et met la main au menton en vous regardant, c’est très dangereux », avertit-il, soulignant les dangers de l’hypocrisie et de la couardise induites par une gouvernance fondée sur la peur et la répression.
Le social au cœur de l’action
S’il vrai que le Père Aguénounon reconnaît les progrès réalisés sous l’actuel régime, notamment en matière d’infrastructures et de digitalisation, il n’en demeure pas moins qu’il déplore l’absence d’un véritable travail sur « les pierres vivantes », c’est-à-dire sur la conscience et la mentalité des citoyens. « Le travail sur l’homme n’étant pas effectif, la mentalité du Béninois n’a pas changé, sinon que c’est pire qu’avant », déclare-t-il. Pour lui, la transformation durable du pays passe par la promotion de trois valeurs fondamentales : le pain, la paix et la liberté. Ces éléments sont essentiels pour cultiver une éducation citoyenne et patriotique qui pourra guider le pays vers un avenir plus harmonieux.
M.M.