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Claudia Sheinbaum,  « Obsessionnelle et disciplinée » Première Présidente du Mexique

Octobre 2024 nous renvoie exactement deux siècles en arrière à des faits historiques marquants. Car octobre 1824 fut un mois mémorable pour les Africains. En effet, le Costa Rica mit fin à l’esclavage. Mais c’est également en octobre 1824 que le Mexique adopta une nouvelle Constitution, et que les Mexicains se sont rendus pour la première fois aux urnes afin de désigner le premier président de la République naissante. Ce président s’appelait Guadalupe Victoria. Attention, ne vous fiez pas à son prénom d’emprunt : il s’agissait bel et bien d’un homme. Depuis lors, tous les quatre ans d’abord, puis tous les six ans, les Mexicains ont voté et élu en tout 65 présidents, qui avaient un point commun : tous des « mâles dominants ».

 Un Tournant Historique pour le Mexique

Fort heureusement, et enfin, le dimanche 2 juin 2024, à la majorité des voix, le Mexique, Etat fédéral composé de 32 entités fédératives, dont 31 États et 1 district fédéral, qui est la Ville de Mexico, a, pour la première fois, confié la magistrature suprême à une femme. Claudia Sheinbaum est déclarée vainqueur avec 59 % des suffrages. Il aura fallu attendre précisément deux cents ans pour qu’une femme brise le dernier plafond de verre de la politique dans cette contrée d’Amérique latine peuplée de 123 millions d’habitants avec une superficie de 1.970.000 km2.

Une Campagne Prémonitoire

Quelques mois avant le scrutin, l’hégémonie des candidates ne faisait aucun doute. Le seul homme dans la course aux côtés de Claudia Sheinbaum et de Xóchitl Gálvez, la principale challenger, le nommé Jorge Álvarez Máynez, n’était crédité que de 8 % dans les sondages. Le célèbre journal El País México avait alors pompeusement titré : «L’heure des femmes a sonné.» C’était bien des mois avant que Lady Harris ne soit investie candidate des démocrates pour la présidentielle chez le géant voisin et qu’elle ne mène une campagne de fond, face à un adversaire donnant dans la surenchère. En effet en novembre 2024, les Américains éliront pour leur part le 47e président des États-Unis, et peut-être aussi la première présidente de leur histoire, l’actuelle vice-présidente, Kamala Harris.

Un parcours qui vaut le détour

Retour à Mexico. Intellectuelle de renom, Claudia Sheinbaum a étudié les sciences physiques à l’Université nationale autonome du Mexique (UNAM) et a obtenu un doctorat en ingénierie de l’énergie. Cette scientifique a rédigé plus d’une centaine d’articles et deux livres relatifs à l’énergie, l’environnement et le développement durable. Élue en 2018, première femme maire de Mexico, l’ancienne danseuse de ballet se décrit comme «obsessionnelle» et «disciplinée». Autant d’atouts qui lui seront utiles dans sa nouvelle expérience pour marquer de son empreinte son passage au plus haut sommet de l’Etat.

Nécessité d’pporter sa touche pour le meilleur et de lutter contre le pire

«VIVE ANDRÉS MANUEL LÓPEZ OBRADOR !» C’est avec ce slogan, repris par des dizaines de milliers de sympathisants en chœur, que Claudia Sheinbaum a lancé, le 1er mars 2024, sa campagne électorale. On dirait à s’y méprendre qu’elle était en campagne pour le président sortant, surnommé « AMLO », lequel ne pouvait de nouveau se présenter après un mandat de six ans. «Nous devrons, ensemble, conserver l’héritage de cet homme qui est aujourd’hui au Palais national et qui a changé en bien l’histoire de notre pays.» Si cette option peut se justifier par la popularité de son mentor, la nouvelle élue aura tout intérêt à se démarquer en mieux dans ses choix de politiques. Notamment celles qui promeuvent l’épanouissement de la femme, sujet qui n’a d’ailleurs pas fondamentalement été abordé par les principales candidates. Car l’ascension d’une femme en haut de la pyramide devrait s’éloigner de l’épiphénoménisme et augurer plutôt de promotions pour ses congénères, méritantes, bien entendu !

En attendant d’évaluer l’action féministe de Claudia Sheinbaum, elle a déjà fort à faire face à l’important défi de la criminalité. Tel un croc-en-jambe de l’histoire, la maire d’une localité de l’ouest mexicain, Yolanda Sánchez Figueroa, a été froidement assassinée, 24 heures à peine après l’élection présidentielle. Insight Crime renseigne que le pays a enregistré 23,3 homicides pour 100.000 habitants en 2023, soit 30.500 victimes mortelles, un taux qui place le Mexique à la non reluisante 14e place mondiale.

La Présidente Sheinbaum a rapidement réagi en annonçant, dès son investiture le 1er octobre dernier, un ambitieux plan visant à renforcer la sécurité dans les zones les plus violentes du pays. Parmi ses priorités pour les cent premiers jours, figurent des actions sécuritaires d’envergure en direction des régions les plus touchées par le crime organisé. Avec une attention particulière portée sur des États tristement célèbres comme Sinaloa et Guanajuato. Elle a mis en place une stratégie ciblant les dix municipalités ayant les taux d’homicides les plus élevés et elle a insisté sur l’importance de l’outil renseignement pour le démantèlement des cartels. En parallèle, son gouvernement se concentre sur la lutte contre le trafic de fentanyl.

Cependant, les défis de la nouvelle présidente ne s’arrêtent pas là. Le secteur pétrolier, autre sujet brûlant, constitue une préoccupation majeure. En effet, bien que le Mexique ait été, dans les années 1970, le 5e producteur mondial de pétrole, sa production a depuis considérablement chuté, ce qui rend le pays dépendant des importations pour satisfaire ses besoins énergétiques. Pemex, la compagnie nationale, représente 7 % du PIB mais est également l’une des plus endettées au monde. Claudia Sheinbaum devra donc envisager d’investir dans des alternatives durables, comme les énergies renouvelables, pour pallier ce déclin.

Enfin, la réforme de la justice initiée par son prédécesseur demeure un dossier épineux. Celle-ci a modifié la Constitution et introduit l’élection des juges et magistrats, y compris ceux de la Cour suprême, par la population, un sujet de controverse qui suscite de vives contestations. Il appartient à la Présidente Sheinbaum de naviguer habilement entre des enjeux complexes afin de répondre à ces trois priorités majeures. Réussira-t-elle à relever le défi sécuritaire, à diversifier les investissements énergétiques et à apaiser les tensions autour de la réforme judiciaire ? Ces interrogations resteront au centre de l’attention dans les prochains mois. En attendant, comme elle, ses compatriotes au féminin se distinguent de plus en plus.

Le Mexique : Nouvel Eldorado pour les Femmes

Le “nombril du lac de la lune”, signification de Mexique en nahuatl, s’avère plein de mystères. Le beau mythe fondateur de la civilisation aztèque renvoie au postulat selon lequel leur terre était l’axe de l’univers, un puissant aimant autour duquel le monde gravitait. Au centre même de ce nombril, ils édifièrent ce qui allait devenir le Mexico actuel, majestueuse capitale hissée sur des lacs et des canaux. En ces lieux-là, presqu’un millénaire plus tard, fait extrêmement rare, deux femmes de tête se sont affrontées, en pole position, pour la plus haute marche de l’État. Mais pas que ça ! Les Mexicaines comptent désormais parmi les meilleures littéraires au monde. Il y a eu le sacre de Cristina Rivera Garza lors de la remise du prestigieux prix Pulitzer, le 6 mai 2024. Parmi les nouvelles plumes remarquables s’illustrent également Gabriela Jauregui (45 ans) et Dahlia de la Cerda (39 ans).

Un archétype à promouvoir cher nos filles par l’éduaction et la disipline ( l’ascèse )

L’avantage des accomplissements hissant de braves pionnières dans les arcanes du pouvoir, réside en ce qu’ils relancent le débat sur la nécessité de l’investissement dans l’éducation des filles jusqu’au supérieur. Par ailleurs, présentons le parcours inspirant de ces archétypes à nos filles afin qu’elles rêvent grand, qu’elles se préparent ; et que chaque chant du coq leur rappelle que leurs aspirations demeurent valables, quand bien même les sirènes méprisantes siffleraient. Le monde n’en serait que moins clivé.

Leadership des femmes : qu’en disent les chercheurs ?

Selon l’étude annuelle Women in the Workplace 2024, menée par McKinsey & Company et LeanIn.org, les femmes possèdent des qualités favorisant considérablement la réussite des entreprises du secteur privé et des institutions publiques. Elles abordent généralement le leadership avec plus d’empathie, d’inclusion et de volonté d’établir des liens. C’est la raison pour laquelle, promouvoir la gent féminine aux postes décisionnels, équivaut à humaniser davantage la société.

L’analyse de Jack Zenger et Joseph Folkman, présentée en 2019, indique que les femmes excellent dans plusieurs domaines managériaux clés. En outre, elles surplantent les hommes dans 17 catégories sur 19. Elles sont notamment plus compétentes en matière de prise d’initiatives, de résilience et bien-sûr de développement personnel.

Par ailleurs, les manageuses ont démontré qu’elles sont généralement meilleures en termes de résultats, d’intégrité, de développement des autres et d’inspiration des équipes. Les points forts des femmes en termes de leadership s’étendent également à la prise de décisions audacieuses, à la promotion du changement, à la fixation d’objectifs ambitieux et à l’amélioration de la collaboration, illustrant ainsi l’humanisme associé à la recherche d’efficience. Des repères indispensables à l’avènement d’une société cohésive et des progrès significatifs.

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