(Avis aux autorités à divers niveaux)
Le marché de vente de poissons frais de Calavi-Tokpa situé dans la commune d’Abomey-Calavi végète dans une insalubrité déconcertante. Pourtant, les répercussions sur la santé des usagers, ne sont pas des moindres.
Vendeuses et usagers cohabitent avec les ordures. Au marché de vente de poissons frais de Calavi-Tokpa, c’est la norme. En effet, dans ce marché de poissons situé dans la commune d’Abomey-Calavi à une dizaine de kilomètres de Cotonou, des sachets plastiques déchirés, des restes de nourriture, des légumes et fruits pourris, des matières fécales, des écailles de poissons et autres déchets pavent le sol. Des tas d’ordures, de par leur volume, forment désormais des digues aux abords de l’embarcadère, porte d’entrée de Ganvié situé sur le Lac Nokoué. Hommes et femmes, enfants et adolescents et même des bébés y passent leurs journées dans une indifférence totale, mangeant et buvant malgré l’odeur pestilentielle qui supplante celle du poisson frais.
Dans l’eau, ce lundi 23 septembre 2024, jour de notre constat, des bouteilles en plastique stagnent entre les pirogues. Des mouches volent autour de flacons vides et de noix abandonnées. Certaines assombrissent même le mur en taule grise du quai. Sans poubelles, certaines vendeuses sont contraintes de brûler leurs ordures. À l’entrée du marché, près de la principale montagne d’ordures, une femme assise décortique à la main de petits poissons. Ça fait quinze ans (15 ans) qu’elle travaille ici. Quand on lui demande son opinion sur les ordures, elle sourit et marmonne des mots en langue locale fon. Une cliente traduit : « Je vis dedans, je suis née dedans, je suis habituée. »
Pourtant…
Approchés, spécialistes de la santé et environnementalistes déplorent cette étroite cohabitation entre les hommes et les déchets. «C’est la santé publique qui est mise en jeu», alerte Uriel Dassoundo, spécialiste en santé et sécurité au travail. Cet expert en santé et environnement à la Polyclinique de l’Amitié ‘’Le Bon Samaritain’’ dresse une longue liste de pathologies qui pourraient être contractées dans ce marché de vente de poissons frais de Calavi-Tokpa. Ceci, à cause du manque d’hygiène. «Vous aurez des maladies du péril hydro-fécales, c’est-à-dire liées à l’eau et aux selles. Cela peut toucher les adultes comme les enfants, mais beaucoup plus les enfants qui mettent la main n’importe où et après la ramène à la bouche. Vous aurez, par exemple, le choléra, la fièvre typhoïde… En général, tout ce qu’il y a comme infections digestives : les parasitoses intestinales, les vers… Il y a aussi le paludisme car là où il y a des ordures, les moustiques sont souvent présents.»
Quant aux feux allumés aléatoirement et dont les traces tâchent sur le sol, ils pourraient augmenter la pollution de l’air et causer des « problèmes pulmonaires », informe Elisée Kinkpé, Dr Généraliste. En général, explique-t-il, « Si l’hygiène des mains est défaillante dans ce milieu, le risque de diarrhée est vite venu. On a aussi le risque de problèmes pulmonaires du fait de la pollution atmosphérique et le risque de pullulation des moustiques avec comme conséquence le paludisme», .
« Personne ne peut encourager cet environnement »
« Personne ne peut encourager cet environnement», s’indigne le Professeur Zacharie Sohou, Directeur général de l’Institut de recherches halieutiques et océanographiques du Bénin (Irhob). « Tout ce qui y vit est infesté. Des odeurs, des mouches qui vont se poser sur les poissons… », décrie l’expert. «Il leur faut un bac de regroupement. Après quelques mois de sensibilisation, il faut sévir», propose-t-il comme approche. «L’insalubrité au marché Calavi-Tokpa est un cas exceptionnel», s’exclame, de son côté, l’Environnementaliste Fulbert Adjimehossou. A l’entendre, maintes fois, il a alerté là-dessus à travers la rédaction d’articles. Mais les choses sont allés de charybde en scylla. Il évoque, lui aussi, au-delà des risques pour la santé humaine, une possibilité de « pollution du Lac Nokoué ».
Avis est ainsi lancé aux responsables à divers niveaux pour que l’hécatombe soit évitée. On se rappelle encore, la mystérieuse mort de milliers de poissons dans le Lac Toho à une centaine de kilomètres au nord-ouest de Cotonou.
Cyrience Fifonsi KOUGNANDE,
Fayola DAGBA (Stag)