Dans le cadre du volet recherche du projet West African Sanitation Policy & Activators (WASPA) mis en œuvre par l’Initiative, Prospective Agricole et Rurale (IPAR), deux études sur l’assainissement au Bénin ont été réalisées par le Laboratoire d’Analyse Régionale et d’Expertise Sociale (LARES). Dans l’entretien que le Directeur administratif du LARES, Professeur Servais Afouda, nous a accordé, il nous dévoile les principaux résultats de ces études et les recommandations pour relever les défis en matière de politiques d’assainissement et de gestion des boues de vidange.
Quel est l’intérêt de ces deux études dont la première porte sur « l’évaluation des politiques d’assainissement au regard des Lignes directrices pour les politiques africaines d’assainissement (ASPG) » prônées par le Conseil des Ministres Africains de l’eau (AMCOW) et la deuxième sur « l’analyse des déterminants socio-culturels, économiques et environnementaux de l’assainissement, en particulier de la gestion des boues de vidange et leurs influences sur les politiques d’assainissement » ?
L’intérêt des deux études menées par le Laboratoire d’Analyse Régionale et d’Expertise Sociale (LARES) dans le cadre du projet WASPA réside dans une compréhension approfondie des politiques d’assainissement en Afrique de l’Ouest. La première étude a évalué les politiques d’assainissement du Bénin en examinant leur conformité aux Lignes directrices pour les politiques africaines d’assainissement (ASPG) du Conseil des Ministres Africains de l’Eau (AMCOW). Tandis que, la seconde étude se penche sur les déterminants socio-culturels, économiques et environnementaux de l’assainissement, mettant particulièrement l’accent sur la gestion des boues de vidange.
Quels sont les principaux résultats à retenir de la première étude sur l’évaluation des politiques d’assainissement ?
Les principaux résultats de la première étude sur l’évaluation des politiques d’assainissement mettent en lumière la conformité, ou non, de ces politiques aux Lignes directrices pour les politiques africaines d’assainissement (ASPG) du AMCOW. Cette analyse permet de déterminer l’efficacité des politiques en place et d’identifier les domaines nécessitant des améliorations.
Au regard des résultats obtenus et de l’analyse des politiques d’assainissement mises en œuvre, est-ce qu’on peut dire que le Bénin est en bonne voie pour atteindre les ODD dans le sous-secteur de l’assainissement comme dans l’Approvisionnement en Eau Potable où les signaux sont bons ?
Des efforts ont été fournis par l’Etat. Toutefois, il reste beaucoup à faire. Ce qui reste à faire ne relève pas seulement de l’Etat. Il y a certes l’Etat qui doit aider au financement et à la régulation du dispositif d’assainissement dans nos villes et toutes les communes du Bénin. Il y a aussi les collectivités territoriales qui doivent suppléer l’Etat à la base sans oublier la responsabilité qui incombe à chaque citoyen dans la gestion de son cadre de vie individuel et collectif.
Face aux insuffisances relevées en matière de politiques d’assainissement, quelles sont les principales recommandations faites pour permettre au Bénin de relever les défis ?
Face aux insuffisances constatées, les principales recommandations pour relever les défis en matière de politiques d’assainissement au Bénin incluent la révision et le renforcement des politiques existantes, l’accentuation sur la sensibilisation publique, et le développement de partenariats multisectoriels au niveau des directions techniques en charge de l’assainissement pour une approche holistique.
Pendant longtemps, les politiques et stratégies en matière d’assainissement n’ont pas réussi à inverser la situation en matière d’accès aux ouvrages d’assainissement. Que peut-on retenir comme principaux facteurs qui motivent des ménages à disposer de latrines fonctionnelles ?
Les principaux facteurs motivant les ménages à disposer de latrines fonctionnelles incluent le milieu de résidence, l’occupation principale, le niveau d’instruction et le statut économique du ménage. Cependant, la disponibilité de latrines n’est pas liée à la religion, l’ethnie ni au sexe du chef de ménage. Les ménages en milieux péri-urbains ont moins de chances de posséder des latrines que ceux en milieux urbains.
Comment peut-on expliquer la différence de taux d’accès aux ouvrages d’assainissement entre les ménages des milieux péri-urbains et ceux des milieux urbains et entre les ménages des milieux ruraux et ceux des milieux urbains ?
La différence de taux d’accès entre les milieux péri-urbains, urbains et ruraux peut s’expliquer par des disparités socio-économiques, des infrastructures disponibles, et des différences de sensibilisation aux enjeux d’assainissement dans ces divers contextes.
La seconde étude s’est beaucoup intéressée à la gestion des boues de vidange qui reste encore une véritable problématique. Que nous révèle cette étude sur les facteurs qui influencent le comportement des ménages en matière de vidange de fosses ?
Parmi les ménages enquêtés disposant de latrines (74,7%), seulement 27,3% déclarent avoir rempli leurs latrines au moins une fois. Cette catégorie se divise en deux groupes : ceux qui ferment systématiquement leur latrine une fois pleine (23,9%) et ceux qui optent pour la vidange des fosses (76,1%). Parmi ces derniers, 28% font appel à des vidangeurs manuels, tandis que 72% préfèrent les vidangeurs mécaniques.
L’analyse des facteurs associés à la gestion des boues de vidange révèle que cette pratique n’est pas liée au milieu de résidence ni à la principale occupation du chef de ménage. En revanche, elle est étroitement liée au niveau d’éducation et au statut économique du ménage. Les ménages dirigés par des chefs ayant un niveau d’éducation secondaire ont plus de chances de vidanger leurs fosses une fois la latrine pleine, par rapport à ceux dont les chefs ont un niveau primaire ou aucun.
Pour les deux études qui ont toutes portées sur le secteur de l’assainissement, quelles sont les principaux enseignements que l’on peut retenir en ce qui concerne la mise en œuvre des politiques d’assainissement dans notre pays ?
Les principales leçons tirées des deux études soulignent la nécessité d’une approche intégrée dans la mise en œuvre des politiques d’assainissement, mettant l’accent sur l’alignement aux directives régionales, la sensibilisation, et la création de mécanismes efficaces de gestion des boues de vidange.
Que faut-il faire pour faire de l’assainissement une priorité dans l’agenda de développement comme les autres secteurs prioritaires ?
Pour faire de l’assainissement une priorité dans l’agenda de développement, il est essentiel d’élaborer des politiques robustes basées sur des recherches approfondies, de renforcer la sensibilisation publique, d’assurer la collaboration intersectorielle, et de mobiliser des ressources adéquates pour la mise en œuvre efficace de ces politiques.
Propos recueillis par Alain TOSSOUNON