La rencontre du lundi 27 décembre 2023 qui a eu lieu à la présidence de la République entre le chef de l’Etat Patrice Talon et une délégation du parti d’opposition Les Démocrates, conduite par son président et ancien chef de l’Etat Yayi Boni, est loin d’être conjuguée au passé. Un autre pan du compte rendu de ces échanges qui ont duré près de 4 heures, constitue le menu du présent décryptage.

 

Au nombre des gros sujets qui ont retenu les attentions et provoqué un tollé général dans la République, à l’issue de cette rencontre entre Patrice Talon, Yayi Boni et sa suite, il y a cette intervention du premier vice-président du parti Les Démocrates, Eric Houndété qui a « osé une proposition » en suggérant au président Patrice Talon de faire démissionner un des sept membres de la Cour constitutionnelle au profit d’un membre du parti LD, étant donné que ces membres émanent tous des deux grands partis de la Mouvance. Ce faisant, à en croire Eric Houndété, le chef de l’Etat aurait réussi à rééquilibrer les choses et rassuré le peuple dans la perspective des élections générales de 2026. Aux yeux de Patrice Talon, c’est la proposition qu’il ne fallait pas faire, car cela s’appelle « de la manipulation des institutions de la République au gré de l’esprit partisan ».

Pour lui, les Démocrates ne devraient pas aller sur ce terrain. Et il a démontré que sans avoir un représentant de sa chapelle politique à la Cour, on peut gagner les élections. Il suffit de faire confiance aux institutions. Et dans son propos, il a rappelé qu’en étant un soutien à la candidature de Yayi Boni élu président en 2006, ils n’avaient personne au sein de la haute juridiction en matière constitutionnelle. Il a ensuite pris son propre exemple quand il a été élu en 2016. Mieux, Patrice Talon fait remarquer que pour les législatives de janvier 2023, Les Démocrates ont obtenu 28 députés, le même nombre que le Bloc républicain, parti au pouvoir.

Le rejet de la première révision constitutionnelle : Talon n’a pas oublié, et pourtant…

 

Comme si tous ces rappels et démonstrations faits à la délégation du parti Les Démocrates n’a pas suffi, le président Patrice Talon a déterré son premier projet de texte sur la révision de la Constitution. Il en rappelle la pertinence surtout en ce qui concerne le mode de désignation qu’on aurait pu revoir dans l’intérêt de tous, si le projet n’avait pas été botté à la touche au Parlement par l’opposition d’alors. « J’ai estimé à l’époque que le pouvoir politique tel qu’il a été organisé au lendemain de la conférence nationale pouvait s’exprimer, pouvait se définir autrement pour changer de palier en terme d’organisation politique de notre pays ; personne n’a voulu.

Moi j’ai voulu que les nominations à la Cour constitutionnelle ne se fassent plus de cette manière et que le président de la République élu ou exercice ainsi que le bureau du Parlement ne soient plus les principales sources de désignation des membres de la Cour constitutionnelle. J’ai voulu ça, mais la classe politique d’alors ne m’a pas suivi dont vous-même Monsieur le président de la République, en 2017 », regrette-t-il. Et il renchérit : « Je voulais qu’on change de modèle de désignation des membres de la Cour constitutionnelle, je voulais qu’on change le mode de désignation même du président du Conseil suprême de la Magistrature.

Il y a certaines institutions dont je voulais la mutation. Pas parce que j’avais une défiance de sincérité ou de transparence ou à leur égard mais parce que je voulais que les choses se passent désormais autrement en terme de modèle politique. Moi je ne voulais pas désigner des gens au sein de ces institutions-là, je ne voulais pas. Et je l’ai dit ouvertement que je préfère ne désigner personne. C’était mon choix. Vous l’avez combattu, y compris vous-même Monsieur le président ». Pourquoi ce rappel avec insistance du chef de l’Etat à l’endroit de son prédécesseur et sa suite ; est-on tenté de se demander ?

Patrice Talon se victime-t-il, ou est-ce sa façon de dire aux opposants « à malin, malin et demi » ? Pourtant, après ce rejet dont il parle, Patrice Talon a oublié de dire publiquement qu’il s’est offert une deuxième chance à la faveur duquel le texte a été voté, haut les mains, par un Parlement sans opposition et entièrement acquis à sa cause. C’était après les législature de 2019. Il avait donc la possibilité d’opérer sa réforme de départ à la Cour constitutionnelle, cette fois-ci sans aucun obstacle. Pourquoi cela ne l’a plus préoccupé comme d’autres dispositions qu’il a reconduites dans le texte qui a fini par être adopté ?

 

Mike MAHOUNA

 

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