Un rapport de l’Institut d’études et de sécurité alerte sur la nécessité d’encadrer l’extraction artisanale de l’or au Bénin pour freiner l’infiltration de ce secteur par les groupes extrémistes violents. Intitulé “Liens entre extrémisme violent et activités illicites au Bénin“, cette étude conduite par Jeannine Ella Abatan et William Assanvo évoque la menace terroriste en lien avec l’extraction artisanale de l’or.

 

“Au fil des années, les autorités béninoises ont pris un certain nombre de mesures visant à mieux contrôler l’extraction artisanale de l’or dans l’Atacora. Un bureau des orpailleurs avait été mis en place pour faciliter la délivrance des autorisations (normalement renouvelables tous les 3 ans) et contrôler les mouvements des orpailleurs. Ce bureau n’est cependant pas parvenu à remplir cette fonction de manière efficace. Il n’a pas fait l’unanimité auprès des orpailleurs, certains ayant remis en question sa légitimité à vouloir réglementer l’activité. Dans les faits, aucune autorisation n’aurait été accordée par le bureau depuis 2018.

La principale mesure prise pour encadrer l’orpaillage dans la zone de Kouatena a été la mise en place d’une unité spéciale de police (Police spéciale de Kouatena) dans le but de sécuriser les sites et de procéder au règlement des conflits liés à cette activité. Cette unité avait remplacé une brigade de gendarmerie spéciale, qui était chargée de sécuriser l’ensemble des sites aurifères sans s’opposer à leur exploitation clandestine. Bien que le Commissariat spécial de Kouatena ait contribué à une réduction des cas de braquage et de vol à main armée, son efficacité a été minée par ses moyens humains et matériels limités : personnel insuffisant, absence de moyens roulants à quatre roues, manque de moyens roulants à deux roues.

Le contexte sécuritaire, caractérisé par une menace terroriste aux frontières du Bénin, aurait joué un rôle non négligeable dans la décision d’interdire l’activité d’orpaillage prise par les autorités béninoises en octobre 2021. Cette interdiction s’est accompagnée d’une expulsion des orpailleurs. Des rumeurs sur la présence de terroristes auraient été à l’origine de mesures sécuritaires, avec un renforcement à la même période de la présence militaire dans l’arrondissement de Perma et dans la banlieue de Kouatena, ainsi que l’instauration de patrouilles mixtes. Des campagnes de sensibilisation organisées par le ministère de l’Intérieur et les élus locaux ont été menées afin d’inciter les populations à la vigilance et de les inviter notamment à identifier et à dénoncer les individus suspects“ révèle le rapport. Toute chose nécessitant “une reprise en main et un meilleur encadrement de l’exploitation artisanale de l’or dans l’Atacora“. A cet effet, les auteurs de l’étude préconisent d’établir, au niveau départemental et local, des structures techniques compétentes au sein du ministère des Mines (et notamment de l’Office béninois de recherches géologiques et minières) qui seraient chargées de veiller à l’application de la législation existante en matière d’exploitation minière.

“Dans le même ordre d’idées, la réactivation ou la redynamisation de la cellule chargée des questions minières au niveau départemental pourrait être envisagée. La sensibilisation et la responsabilisation d’acteurs communautaires à la nécessité de respecter les conditions d’accès aux autorisations d’exploitation sont à entreprendre. Par ailleurs, la révision en cours de la loi de 2006 portant code minier et fiscalités minières en République du Bénin offre l’occasion de repenser, en concertation avec toutes les parties prenantes, l’encadrement de l’orpaillage dans le pays afin de l’adapter aux défis auxquels ce secteur pourvoyeur d’emplois fait face. La présence sur les sites d’orpaillage de ressortissants provenant de plusieurs pays de la région souligne la nécessité de mettre en place des dispositifs de suivi et de contrôle des flux migratoires, en collaboration avec les autorités et les acteurs locaux. Cette démarche passe également par le renforcement de la collaboration entre forces de sécurité et populations. Il apparaît nécessaire de consolider les capacités opérationnelles de la Police spéciale de Kouatena en la dotant de moyens humains et matériels adéquats“ lit-on également.

A.B

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